Idée reçue n°6 : le nucléaire fragilise les emplois et les territoires
En ces temps de dates anniversaires des catastrophes de Fukushima et Tchernobyl, de nombreux débats et avis s’opposent sur la baisse de la part du nucléaire dans la production d’électricité et viennent parsemer l’actualité. Que l’on soit pour ou contre l’atome, il est essentiel d’avoir accès à des données et faits objectifs pour comprendre les enjeux du futur mix énergétique français. Des enjeux que nous tous, citoyens, pourrons suivre pendant la révision de la Programmation pluriannuelle de l’énergie qui débute le 19 mars.
La rédaction du Monde de l’Energie a décidé de décrypter pour vous les idées reçues les plus souvent reprises concernant le nucléaire.
Notre semaine spéciale « idées reçues » touchant à sa fin, intéressons-nous aujourd’hui sur un sujet crucial qui touche directement les territoires et les emplois. On a effectivement souvent tendance à l’oublier mais plus de 220.000 professionnels vivent de la filière nucléaire. Autant d’emplois aux désastres sociétaux, économiques et régionaux si le nucléaire venait à disparaitre.
Tous ces emplois dans le nucléaire sont-ils vraiment indispensables ? Pourquoi est-ce que la France continue d’investir dans ce secteur soi-disant sinistré ? Les énergies renouvelables sont-elles capables de générer autant d’emplois ? Autant de questions sources de confusions et d’idées reçues.
Sortir du nucléaire va créer de nouveaux emplois en France
Le nucléaire est la troisième filière industrielle française derrière l’aéronautique et l’automobile. Elle regroupe plus de 220.000 professionnels qualifiés répartis dans plus de 2.500 entreprises partout en France. Elle a généré un chiffre d’affaires de 50 Md€ dont 14 Md€ de valeur ajoutée. La filière consacre 1,8 Md€ à des activités de R&D et s’implique activement dans la formation des jeunes et dans l’insertion des personnes en situation de handicap.
L’essentiel des emplois de la filière ne peut être délocalisé. La présence d’une installation nucléaire dans un territoire génère un impact positif sur l’économie, l’emploi indirect, les recettes fiscales, etc.
En 2016, plus des trois quarts de la production française d’électricité d’origine nucléaire provenait de 4 grandes régions : Grand Est avec 4 centrales nucléaires (production nucléaire de 82,7 TWh en 2016, soit 77% de la production électrique régionale cette année-là), Centre-Val de Loire avec 4 centrales (75,7 TWh en 2016 et 96% de la production régionale), Auvergne Rhône-Alpes avec aussi 4 centrales (75 TWh en 2016 et 69% de la production régionale) et pour finir la région Normandie avec 3 centrales (57,3 TWh en 2016 soit 89% de la production régionale).
A titre d’exemple, à la centrale de Dampierre-en-Burly située en région Centre, 1366 salariés EDF travaillent sur site, ainsi que 500 salariés permanents d’entreprises prestataires, tout au long de l’année. A cela, il faut rajouter les salariés d’entreprises prestataires lors des arrêts pour maintenance : de 600 à 2 000 selon le type d’arrêt. Les entreprises locales sollicitées sont aussi nombreuses. En 2017, les marchés passés avec les entreprises locales pour la maintenance représentent 26 millions d’euros. De plus, la centrale contribue à la fiscalité locale à hauteur de 69.9 millions d’euros, dont 7,4 millions d’euros pour la seule taxe foncière.
Une sortie rapide du nucléaire aurait de lourdes conséquences sociales, économiques et sociétales. A titre de comparaison, selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), le développement des énergies renouvelables dans les 5 ans à venir pourrait être créateur d’environ 10.000 emplois dans l’éolien et le photovoltaïque, en complément des 19.000 existants.
Le nucléaire français s’exporte mal dans le monde
La France est leader sur les marchés internationaux et son savoir-faire est reconnu mondialement, notamment en termes d’exploitation et de sûreté. Le groupe développe avec le nouveau nucléaire, comme l’EPR, une technologie parmi les plus innovantes au monde dans le secteur. Les PME françaises du secteur nucléaire s’exportent 5 à 10 fois plus que la moyenne de l’industrie, notamment en Asie et en Amérique du Nord. Selon la Société française d’énergie nucléaire (SFEN), en France comme à l’étranger, la phase de construction d’un réacteur EPR représente 8350 emplois de créés pendant 7 ans puis 1650 emplois durant les 60 ans de son exploitation.
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