L’ultimatum du Covid-19 contre la transition énergétique

Tribune de Samuele Furfari, professeur à l’Université libre de Bruxelles.

Sur BFM, monsieur Nicolas Hulot a estimé que la crise provoquée par le coronavirus Covid-19 est un « ultimatum de la nature ». Nous sommes nombreux à penser qu’au contraire nous assistons à un ultimatum envers la transition énergétique et envers le « Green deal européen ou pacte vert pour l’Europe ».

Les écologistes contre la mondialisation

Dans la lignée de tous les catastrophistes qui dominent l’essentiel des médias, les écologistes politiques s’empressent en ce moment de profiter de la crise que nous vivons pour fustiger notre mode de vie, notre système économique mais aussi la technologie et leur corollaire qu’est le progrès du bien-être.

Ne soyons pas dupes. Ce qui a déclenché cette frénésie des activistes environnementaux est leur prise de conscience que leur rêve vert s’est fracassé sur le mur impitoyable de la réalité.

Heureusement, d’autres, en réaction  ― et parfois avec des excès de langage  ― ont enfin le courage de dénoncer l’absurdité et les dangers de leur utopie ou, plutôt, les médias commencent à leur donner du crédit. Cela hérisse les premiers qui sentent que leurs chimères ne font plus l’unanimité dans les médias.

Il ne restera plus qu’aux politiciens de tenter de sauver la face, en assénant que des scientifiques ont abusé d’eux, en prétextant un changement de priorité, pour affronter, d’abord, la crise sanitaire et ensuite la lente et longue reprise économique qui ne pourra avoir lieu que si nous vivons à crédit pendant quelques années, voire décennies. Qui eût pensé que la Commission européenne aurait suspendu les intouchables critères de Maastricht, appliqués si strictement aux Grecs durant leur crise ?

Face à la crise économique, finis les gaspillages verts

Face à la crise économique généralisée qui nous attend, il va falloir dépenser de manière ciblée et cesser de gaspiller. Lorsqu’un client ne paye plus sa facture d’électricité, afin quand même de disposer du minimum vital, le distributeur d’électricité place sur son compteur électrique un limiteur de puissance pour l’empêcher de consommer ce qu’il ne peut payer.

Fini le gaspillage électrique pour le mauvais payeur. Il en sera de même avec les maigres ressources financières qui nous restent.

Ainsi, finis les gaspillages verts ! Fini d’arrêter une centrale nucléaire en bon état de marche, avec une production impeccable pour satisfaire une poignée d’idéologues.

Fini de subsidier des parc éoliens onéreux qui n’ont qu’un impact bien faible sur les émissions de CO2 par rapport à ce que permet déjà le nucléaire.

Fini de financer des biocarburants, au motif que le pétrole, symbole avec l’automobile de la réussite de l’économie de marché, est honni.

Fini de subsidier l’achat de véhicules électriques que l’on ne pourrait de toute façon pas développer massivement sans éventrer toutes les rues de nos villes pour augmenter la puissance du réseau électrique, quoiqu’en disent les études payées par ceux qui veulent vendre davantage d’électricité.

Fini de continuer à parler du biogaz, une filière inventée dès les crises pétrolières des années soixante-dix et qui n’est toujours pas viable.

Finie l’utopique « société de l’hydrogène » que la Commission européenne propose depuis 1972, soit avant la première crise pétrolière, filière mort-née puisque la chimie et la physique ne dépendent pas du législateur. L’hydrogène est une molécule produite par l’Homme et n’est donc pas une énergie mais un vecteur énergétique au même titre qu’un câble électrique.

Fini « l’Airbus des batteries », domaine où l’électrochimie ne permettra pas avant longtemps de développer des stockages autres que pour des consommations très limitées.

Selon Nicolas Hulot, il est temps de vivre en autarcie

Monsieur Hulot prône un modèle favorisant la proximité. Le Covid-19 nous impose de tester son modèle, non pas intellectuellement, mais dans notre vie quotidienne, en grandeur nature.

Le modèle du consommer local, aussi appelé « kilomètre zéro », souhaité par les activistes qui voudraient nous faire vivre dans notre petit territoire, qu’ils nomment dans leur littérature une « biorégion ».

Un tel mode de vie nous permettrait de fraterniser en faisant du troc, mais uniquement avec nos voisins suffisamment proches car nous devrons limiter au maximum les échanges à ce qui ne peut être produit localement.

Finis les bananes et les ananas pour les Français car autour de la France, aucune biorégion proche n’en produit ; nous devrons nous contenter de pommes et de poires, en saison, et pour autant qu’il y en ait pour tout le monde (frugalité et rationnement).

Fini le vin pour les Finlandais car aucune biorégion autour de ce pays n’en produit.

Fini le chocolat en Belgique car personne ne produit du cacao.

Fini le café si cher aux Viennois.

Arrêtons là cette énumération ridicule et dangereuse du repli sur soi. Nos ancêtres ont vécu l’autarcie forcée, nos aïeux l’ont abandonnée, nos enfants n’y retournerons pas. En effet, elle rompt les contacts sociaux ; or, d’évidence, ce dont nous souffrons le plus durant ce confinement est bien le manque d’échanges sociaux, les médias sociaux montrant leur profonde inadéquation avec notre ADN, qui nous pousse à vivre en société.

Le refus de l’économie de marché

Il ne vous aura pas échappé que, derrière les propos des activistes, se cache en fait le refus de l’économie de marché, et de son corollaire : la globalisation.

L’Europe a été à la base de ce changement profond de société, de cette extraordinaire amélioration de la qualité de vie. Jamais personne, ni autant de personnes, n’ont vécu aussi bien que nous dans l’Histoire de l’humanité, en ce inclus dans d’autres régions du monde.

Il existe une relation irréfutable entre la consommation d’énergie et l’espérance de vie, entre les émissions de CO2 et la qualité de vie telle que mesurée par les Nations unies (HDI). Le Roi Soleil dans toute sa splendeur à Versailles vivait bien mal par rapport à nous : il avait besoin d’un grand nombre de serviteurs pour mal chauffer son château à partir d’énergie renouvelable, le bois. Nous avons la chance d’avoir l’énergie moderne, modulable à souhait, pour notre confort.

Aujourd’hui les activistes veulent nous faire croire que nous nous sommes trompés, que nous devons renier ce modèle. Avec une inconscience désarmante ils nous proposent de « repenser [la]  manière de se déplacer et ne plus prendre l’avion, redécouvrir les transports doux et rouler moins de 2000 km par an en voiture [et de manger]  de la viande maximum deux fois par mois». Tous ceux qui ont dû changer brusquement de mode de vie apprécieront.

La solution dans le développement technologique et scientifique

Allez le dire aux Sud-Coréens qui sont parvenus à juguler la crise du coronavirus Covid-19 de manière exemplaire. Les dirigeants et la population de cette vibrante et jeune démocratie continuent à miser sur le développement technologique et scientifique. Il suffit d’observer combien de produits coréens de qualité envahissent aujourd’hui l’Europe pour comprendre combien ils nous devancent dans le développement technologique, y compris ― et là c’est une surprise ― dans le domaine médical.

Allez le dire aux Africains qui ne produisent pas beaucoup de CO2 mais qui ont une espérance de vie bien inférieure à la nôtre, ce qui les pousse à tenter d’aller vivre là où l’on émet du CO2. Eux n’ont pas besoin d’un limiteur sur leur compteur électrique : la grande majorité n’en dispose pas puisque seulement 35 % de la population a accès à l’électricité.

De plus, ces privilégiés n’ont accès à la fée électricité que de manière aléatoire et pour des consommations très faibles. Ils meurent aussi de l’air pollué, non d’abord à cause des usines, mais à cause de la pollution dégagée par leur foyer de cuisine nourri à la bouse et aux plastiques.

Comme je le dis dans mon livre, il est urgent d’électrifier l’Afrique et, de grâce, ne leur faites pas l’injure de leur parler d’énergies renouvelables que nous-mêmes n’avions pas les moyens financiers de nous payer avant la crise du coronavirus. Que feront, sans électricité pour les ventilateurs pulmonaires, les Africains si le Covid-19 n’est pas neutralisé par la chaleur naturelle ? Il y aura une hécatombe parce qu’ils n’ont pas d’électricité.

Tirons les leçons de cette crise

La crise du coronavirus Covid-19 met en évidence que nous devons cesser de nous préoccuper de la température qu’il fera, selon un modèle mathématique, en l’an 2100. Cela n’intéresse plus que ceux dont le travail dépend du virus de la peur, qu’ils ont instillé dans la population.

Le fait est que nous n’avons pas été capables de produire et stocker le matériel sanitaire indispensable pour sauver des vies, mais nous prétendons déterminer quel sera le niveau des mers à l’avenir et imposer les conséquences de ce choix à l’ensemble de la population mondiale. Quel orgueil ! C’était ridicule, c’est aujourd’hui inadmissible.

Rêver à déterminer l’avenir, l’imposer aux Européens par la Loi et exporter ce modèle au reste du monde était déjà une utopie, aujourd’hui ce serait une faute. Les dirigeants du monde, à commencer par ceux de l’UE, feraient bien de mettre de côté l’utopie verte et de s’occuper enfin des vrais problèmes des gens car « la crise sanitaire que nous vivons pourrait être fatale à l’UE ».

Par exemple, en cas de crise, l’Union européenne pourrait développer une politique de solidarité digne de ce nom. Nous venons d’observer avec dépit que la Chine a davantage aidé concrètement l’Italie (même si c’était aussi pour des raisons de communication politique) que ne l’a fait l’UE. Le président du Conseil européen a écrit une lettre, au demeurant très aimable, mais étonnamment longue comme pour se justifier, au président de la République italienne, mais sans mesure concrète.

Une partie de la population italienne, par un renversement historique très surprenant, était déjà devenue eurosceptique. Pensez-vous que les Italiens vont oublier ? On observe en ce moment d’une part que les partis italiens de centre-droit sont assez mesurés dans leur critique envers l’UE, tandis que le parti de centre gauche ne tarit pas d’éloges envers elle. Comme si, à l’instar des activistes écologistes, ils voulaient conjurer le sort de l’inévitable conséquence qu’ils perçoivent dans l’opinion publique italienne.

Monsieur Hulot parle d’absurdité. S’il y a une absurdité, c’est bien celle qui lui est si chère, celle de la transition énergétique, du repli sur soi, du confinement et de la pénurie permanente.

Comme monsieur Hulot, tous les politiques disent qu’après cette pandémie, rien ne sera plus comme avant. En effet ! Nous sommes donc nombreux à penser que le vrai ultimatum que le Covid-19 lance au monde politique est la nécessité immédiate de mettre fin à cette idéologie verte rétrograde et à son pacte vert pour l’Europe, qui aboutiraient inévitablement à la pénurie et au repli sur soi permanent en Europe et à relancer l’UE du progrès, de la technologie, de la science et de l’énergie abondante et bon marché.

 

commentaires

COMMENTAIRES

  • « Fini de subsidier des parc éoliens onéreux qui n’ont qu’un impact bien faible sur les émissions de CO2 par rapport à ce que permet déjà le nucléaire.  »
    Espérons-le.

    La transition énergétique, c’est essentiellement ajouter une ligne (CSPE) sur notre facture d’électricité.
    Une ligne pour décarboner une électricité… qui est déjà décarbonée !
    … Trouvez l’erreur.

    Les subventions accordées au photovoltaïque en France représenteront « 2 Md€ (milliards d’euros) par an jusqu’en 2030 (soit 38,4 Md€ en cumulé) pour un volume de production équivalent à 0,7 % du mix électrique. » », et que « la pleine réalisation des appels d’offres de 2011 et 2013 sur l’éolien offshore coûterait aux finances publiques 2 Md€ par an pendant 20 ans (soit 40,7 Md€ en cumulé) pour un volume équivalant à 2 % de la production électrique 1. »  (Rapport de la Cour des comptes « Le soutien aux énergies renouvelables » – mars 2018 – Voir aussi : La Cour des comptes alerte sur le coût des EnR – Avril 2018)
    … Des milliards pour 2 + 0,7 % du mix électrique !
    http://ecologie-illusion.fr/paradoxe-energies-renouvelables-gratuites-ruineuses.htm

    Répondre
  • Nicolas Hulot raconte n’importe quoi. Depuis l’antiquité, l’humanité vit régulièrement avec des épidémies. Qu’il étudie un peu l’histoire au lieu de faire de l’idéologie !

    Répondre
  • Il y a beaucoup d’erreurs graves et aisément vérifiables dans la tribune de Samuele Furfari

    – les agrocarburants ne sont en rien une idée d’écologistes qui au contraire les condamnent régulièrement depuis longtemps mais celles de lobbies notamment agricoles qui y voyaient de nouveaux revenus et diversification et d’intervenants du secteur des moteurs thermiques qui trouvaient là une manière de faire perdurer des motorisations thermiques très lucratives en entretien mais peu efficientes en rendement. Un des pays qui a fortement développé les agrocarburants comme le Brésil ou encore les Etats-Unis ne l’ont en outre pas fait pour des raisons écologistes et on y trouve aussi une diversification du secteurs pétrolier/fossile.

    – concernant les renouvelables c’est bien notamment grâce à l’Allemagne et à la Chine, entre autres, que leur prix a pu baisser comme jamais avant aucune énergie dans l’histoire et qu’elles sont accessibles à bas prix et rapidement aux pays émergents, Afrique, Inde etc qui eux-mêmes trouvent des diversifications et emplois et continuent d’en faire baisser les prix (Inde notamment)

    – ce n’est évidemment pas avec des EPR à 130 euros le MWh ou avec le russe Rosatom bras armé du Kremlin qui a coutume de fournir des avances financières sur plusieurs dizaines d’années pour imposer ses produits, y compris via des contrats secrets durant 35 ans pour les parlements (comme en Hongrie etc), à des pays ne disposant pas de l’argent nécessaire et deviennent donc durablement surendettés et ultra-dépendants de ce fournisseur et pays que l’on va traiter les problèmes de l’Afrique, mais au contraire avec entre autres les micro-réseaux renouvelables notamment. La corruption est aussi un des aspects à traiter.

    De plus les réseaux de ces pays ne sont pas adaptés aux centrales nucléaires. Le coût est donc bien supérieur aux renouvelables qui peuvent être aussi locales et les dangers et risques de dissémination, de conflits, de déchets toujours bien présents puisque par exemple au Moyen-Orient les centrales nucléaire sont une cible privilégiée dont ne se cache par l’Iran entre autres pays.

    – Pour ce qui est des réacteurs nucléaires en bon état de marche on a pu constater quelques problèmes en Belgique et au lieu de faire des « tribunes » fourre-tout et vouloir donner des leçons à tout le monde il serait peut être plus efficace de bosser plus sérieusement et en détail le secteur de l’énergie et ses innovations au lieu de se défouler avec plein de données erronées.

    – Pour ce qui est de la physique de l’hydrogène Samuele Furfari se base sur son blog sur les conditions standard. Ce qui n’est évidemment pas le cas en pratique puisque l’on optimise toutes les étapes du process en terme de pression, chaleur, récupération de chaleur autrement perdue etc. On obtient donc des rendements globaux en électrolyse de plus de 90% et en power to gas de plus de 82%.

    – Peut-être que Samuele Furfari préfère le charbon le pétrole ou le gaz polluants et plus mortels que le Covid-19 dont ils facilitent l’impact auprès des personnes victimes de la pollution, ou qu’il est payé par Rosatom et Gazprom pour ses tribunes, mais on peut remarquer qu’en plus de la pandémie du Covid-19 il y a une guerre entre les principaux producteurs dont Arabie Saoudite, Russie Etats-Unis pour capter de plus importantes parts de marchés, ce qui n’est pas de bon augure à terme pour l’évolution du prix des énergies fossiles dont beaucoup de pays sont encore très dépendants et dont nous dépendront encore plus via les formes non combustibles. Leur prix et pour l’instant temporairement très bas, mais les arrêts de production en cours pourrait dans quelques années les faire repartir tout autant à la hausse.

    Dès lors on ne voit pas bien comment contourner l’hydrogène, le power to gas et X renouvelables, classé « verts » dont les prix sont régulièrement en baisse comme le confirment Air Liquide, Air Products, Nel, DNV GL etc

    – Quant à la « relation irréfutable entre la consommation d’énergie et l’espérance de vie », la consommation croissante d’énergie et de combustibles fossiles sur quatre décennies n’a visiblement pas joué un rôle significatif dans l’augmentation de l’espérance de vie dans 70 pays.

    https://www.sciencedaily.com/releases/2020/03/200326193906.htm

    C’est donc grave pour un professeur d’université de diffuser autant de données erronés en si peu de lignes. Il est temps de se recycler sérieusement !

    Répondre
  • Energie+ C’est intéressant votre contribution, mais je pense qu’elle est tout autant tendancieuse que la précédente. Il y a une chose certaine cependant, c’est que la peur de l’atome enlève la majorité de capacité de réflexion. On subit sans broncher les développements militaires atomiques alors que les pacifiques sont honnis sur la base des résultats qu’ont entraîné quelques bêtises de fonctionnement. Il est vrai que l’argent serait mieux investi en Suisse par exemple pour trouver des voitures qui ne consomment que 1l de carburant au 100 km que d’acheter des avions aux prix de milliards. L’industrie mécanique moribonde Suisse pourrait peut-être s’en relever.

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