etats gagneraient promouvoir densification villes pour accelerer reduction emissions gaz effet serre - Le Monde de l'Energie

« Promouvoir la densification des villes pour accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre »

Le Monde de l’Energie ouvre ses colonnes à Juste Rajaonson, professeur en études urbaines à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), auteur du récent article La densification des villes est bonne pour l’environnement… et l’économie (The Conversation), pour analyser les avantages de la densité urbaine dans l’optique de la transition énergétique.

Le Monde de l’Énergie —En quoi le modèle de la maison individuelle avec jardin est-il problématique en terme de consommation d’énergie ?

Juste Rajaonson —Pour les ménages, la maison individuelle avec jardin est souvent plus énergivore que les autres types de logement comme les immeubles d’appartements, par exemple, car elle est généralement plus grande en superficie, ce qui nécessite plus d’énergie pour la climatisation et le chauffage. Les besoins d’éclairage sont aussi plus grands, notamment pour l’éclairage extérieur. Au Québec par exemple, la consommation d’énergie des ménages résidant dans des maisons individuelles représente le double de celle des ménages résidant dans des immeubles d’appartements de plus de 5 étages. Finalement, si l’on rajoute dans ce bilan les besoins de déplacements vers les lieux de travail par exemple, c’est certain que la consommation énergétique est relativement plus importante car ce modèle de logement est plus répandu en périphérie des noyaux urbains centraux, ce qui rend les ménages généralement dépendant de l’automobile.

Pour les villes, la maison individuelle avec jardin est aussi plus énergivore que les quartiers compactes, dans la mesure où les véhicules de service (ex. ramassage des matières résiduelles) doivent parcourir des distances plus grandes pour desservir un même nombre de résidents.

Le Monde de l’Énergie —Quels avantages présente l’habitat urbain dense en terme de consommation énergétique et lutte contre le changement climatique ?

Juste Rajaonson —Concrètement, tout le monde est gagnant à long terme. Les ménages y bénéficieraient de logements qui consomment moins d’énergie, donc moins de dépenses pour le portefeuille. De plus, ils peuvent accéder à un cocktail de transports, incluant la marche et le vélo. Les municipalités et les distributeurs énergétiques gèreraient pour leur part un réseau plus concentré dans l’espace, ce qui réduirait les coûts d’opération et faciliterait les interventions en cas d’interruption.

De plus, comme les habitats urbains plus denses comprennent aussi des entreprises et des commerces, par exemple, au rez-de-chaussée des bâtiments, il y aurait également des opportunités de partager la facture d’électricité ou de récupérer l’énergie à d’autres fins (ex. agriculture urbaine). Finalement, selon les travaux du GIEC sur l’atténuation du changement climatique, les États gagneraient à promouvoir la densification des villes pour accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre sur leur territoire, puisque c’est dans les villes que le potentiel de réduction serait le plus substantiel.

Le Monde de l’Énergie —Sous quelles conditions la densité urbaine peut-elle être rendue plus acceptable, voire désirable ?

Juste Rajaonson —Pour les municipalités réticentes, il faut montrer des modèles de réussite de villes de tailles variées et de caractéristiques variées qui ont mis en place des mesures de densification. Il faut effacer cet imaginaire que densifier est synonyme de condenser plus de personnes dans un espace plus restreint et faire émerger des grattes-ciels. Il s’agit plutôt de tirer parti de tout l’espace urbain déjà disponible et de l’utiliser de façon créative et innovante. Pour ce faire, il faut promouvoir les avantages économiques et financiers de la densification et de la mixité des usages.

Pour les ménages, il y a aussi un enjeu économique important. Aujourd’hui, si la classe moyenne ne peut pas se permettre d’habiter dans les noyaux urbains centraux et doit plutôt s’éloigner en périphérie où le bassin de logements est surtout constitué de maisons individuelles, alors on a un problème. Les gouvernements doivent intervenir pour rendre abordables les secteurs urbains les plus denses. Autrement, il y aura toujours une demande de plus en plus importante pour les maisons individuelles en banlieue et le cercle vicieux se perpétuera.

Le Monde de l’Énergie —Quelles politiques publiques vous semble-t-elle les plus efficaces pour favoriser une évolution vers ces nouveaux modèles d’aménagement urbain, et donc de mode de vie et de consommation d’énergie ?

Juste Rajaonson —Parmi les mesures à mettre en place pour favoriser des modèles d’aménagement plus compacte, il faut fondamentalement rendre ce mode de vie à la fois désirable et accessible financièrement pour la grande majorité de la population.

Aujourd’hui, ces modèles sont déjà désirables puisqu’ils sont au coeur des documents de planification urbaine d’un très grand nombre de villes. Ici, on parle notamment de mesures incluant l’offre de logements attractifs à proximité de services et de commerces diversifiés et de grande qualité.

Par contre, en étant désirable, ces modèles créent des effets pervers dans les secteurs urbains les plus denses en rendant les logements inaccessibles financièrement. Il faudra donc mettre en place des mesures pour rendre les logements plus accessibles. Pour ce faire, il faudra agir non seulement au chapitre de l’offre de logements (ex. augmentation de l’offre de logements abordables et programmes destinés aux propriétaires…), mais aussi au niveau de la demande (ex. soutien financier aux locataires à faible revenu et aux premiers acheteurs, augmentation des salaires minimums…).

En somme, il faut garder en tête que les causes des problèmes environnementaux peuvent être économiques et les conséquences de ces problèmes peuvent être sociales. Dans ce sens, pour solutionner des problèmes environnementaux, il faudra parfois agir sur des enjeux économiques et sociaux.

commentaires

COMMENTAIRES

  • Bonjour,

    « Toute erreur est fondée sur quelques vérités dont on abuse » Bossuet

    Comment sont alimentés de supermarchés ?
    Cela suppose que la ressource en pétrole est infinie.
    Pourquoi les villes font des zones industrielles séparées des habitats ?

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  • Article intéressant sur ce point essentiel bien peu traité par rapport au nucléaire et aux ENRv.
    Il va falloir moins de petits villages éparpillés et plus de petites villes assez denses.
    Continuer sur le modèle actuel en pensant qu’avec le nouveau nucléaire, les ENRv et les voitures électriques cela va bien se passer, est une folie.
    Il va falloir dire aux maires des petits villages qui sont tous obsédés par la croissance démographique de leur commune que l’avenir va être dur pour eux. Pour autant, la vie dans les petites villes n’est pas non plus idéale étant donné l’énorme problème des incivilités qui pourrissent la vie des habitants, notamment ceux en HLM.

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    • @Marc,

      Dans les Faits et vu aussi les pratiques agricoles régionales et parfois spécifiques, cela revient à l’urbanisme d’il y a 100 ans et plus…
      Ce sont les métropoles qui risquent de souffrir aussi…

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  • De plus, des habitants compacts permettent des économies d’énergie par une utilisation optimale de cogénération (quelque soit la source) pour le chauffage des locaux et de l’eau chaude sanitaire. La France bat des records dans la dispersion de l’habitat principal, dans la possession de résidences secondaires (10 % en moyenne sur tout le territoire) et de piscines privées.

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    • @cochelin, sidéré d’entendre le mot « COGENERATION » prononcé par une autre personne que moi. Serions-nous au moins 2 en France à supporter cette merveilleuse technologie ? 2 mots résument ma vie professionnelle : pyrogazéïfication (déchets de biomasse et déchets urbains carbonés secs et solides) et cogénération avec une large palette de combustibles différents (incluant du syngas) . Au soir de ma vie professionnelle, pour ne pas dire de ma vie tout court, j’essaie de marier mes 2 compétences majeures , et si EDF traine des pieds, je sais bien pourquoi et je commence à leur en vouloir parce que moi, je ne suis contre rien , mais pour tout, y compris le nucléaire que je préfèrerais réparti sur le territoire en grand nombre de puissance unitaire 100 MWe cogénérables. A côté d’un petit millier de cogénération déchets (entre 300 kWe et 2 MWe unitaire) de toute nature fonctionnant à régime variable et en dernier rang de la chaine de production. Qui peut me prouver que c’est idiot ? Même pas JMJ qui préfère tourner la tête ailleurs et ne pas répondre. Mal à l’aise ! Alors on attend quoi ? Le déluge, il arrive, en alternance avec des sécheresses terribles et tres longues.

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      • @ClaudeChoppin,

        Il existe des sites de Co-génération depuis assez longtemps en France. Pas assez, je vous l’accorde.
        Ci-joint le lien vers l’incinérateur de Brest qui chauffent quelques 30.000 équivalents habitants – https://www.sotraval.fr/valorisation-energetique/machefers/ . Par contre il y a eu à maintes reprises des protestations contre les émanations de cette usine et des informations contradictoires sur la nature des fumées, sachant que cette usine est très proche (voir insérer dedans) de l’agglomération.

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  • Pour des motifs d’économie d’énergie, avec cette concentration d’individus on favorise l’incivilité, la délinquance les trafics de drogues et le besoin en ces substances de la population à cause du mal être! .En effet comme il est dit plus haut :
    « Toute erreur est fondée sur quelques vérités dont on abuse »

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    • @Michel Dubus,

      Les immeubles Haussmanniens de Paris (datant pour beaucoup de la fin XIXème) créent quasi la plus forte densité de personne possible au m2 en incluant les voiries et diverses autres nécessités… Pas plus de drogue que cela… et un realtif succès toujours valable plus de 100 ans après…
      Les architectures des villes françaises du XIXème étaient en général très efficaces sur de nombreux aspects…

      Les grands ensembles des années 60-70 (voir 80) n’ont pas eu le même effet… et ne sont pas au m2 en comptant les voiries et les espaces entre immeubles tellement optimum sur pas mal de critères…

      Nota : Chaque génération veut ré-inventer la poudre, mais les chinois ont été les seuls à le faire il y a bien longtemps…
      Un peu de « bon sens » et d’humilité seraient un joli progrès pour les générations actuelles…

      Répondre
    • Il existe 2 operas rock qui en ont fait leur livret : MEGALOPOLIS de Herbert Pagani, un franco-italo-juif et berbère, communiste et libéral, bref un surdoué. Et Luc Plamendon qu’on ne présente plus avec son STARMANIA, copie à peu pres conforme.
      Dans les 2 cas , ça ne donne pas vraiment envie. On ne vit pas pour résoudre nos problèmes d’energie mais pour vivre tout simplement, et heureux si possible.

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      • @Claude Choppin,

        Vous avez raison sur votre propos : «  » On ne vit pas pour résoudre nos problèmes d’energie mais pour vivre tout simplement, et heureux si possible. «  » –> Mais nous sommes tous face à la décrue du pétrole qui arrive. Ce pétrole est rentré partout dans nos vies d’occidentaux (transport bien sûr, mais pétrochimie aussi, avec le(s) plastique(s) et quasi toutes les chimies d’aujourd’hui ! même si le Gaz est aussi une des mat 1ères de la Chimie). Comment faire face à cette décroissance !?

        Nos villes d’il y a 100 ans avaient des ceintures maraichères autour d’elles-mêmes (utilisant même les « besoins » en engrais…). Les céréales et quelques autres denrées, cela peut se transporter sur de longues distances (les Romains le faisaient même avec du 100%ENR…), mais aujourd’hui nos alimentations sont dépendantes du pétrole à plus de 90%, pour le transport, mais aussi pour la culture (y compris le plastique des maraichers bio et même ceux en « permaculture » sous serre…).

        Personnellement, j’ai de plus en plus de mal à vivre « heureux » et sans me soucier de « demain » devant les problèmes énergétiques chroniquesà venir…
        Vivre avec toujours plus rend en moyenne « heureux », Vivre avec toujours moins rend en moyenne les gens, non-préparés à cela, malheureux (si ce n’est pas autre chose, violence et autres expressions de colère !) …
        QUID pour les jeunes d’aujourd’hui ??? Et l’ENRisme inconscient est une source d’inspiration pour certains mais tellement mal compris dans les contraintes réelles à venir …

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  • Si je préfère dépenser davantage pour rester dans une maison et en contrepartie, par exemple me priver d’aller au restaurant ou faire de grands voyages, c’est mon droit le plus strict et je n’ai que faire des suggestions politiquement correctes de ce personnage. Je suis surpris qu’il ne préconise pas des camps de concentration, qui étaient très économes en énergie.

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    • @ Brun
      Tout à fait ! Je ne voyage pas car quand on vit ds un clapier on ne pense qu’à une chose, s’y échapper vers de grand espaces harmonieux par les voyages ou les substances !
      Le bilan énergétique in fine y est meilleur de notre côté

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    • @BRUN, gonflé, mais super-efficace car tellement juste. C’est là où on voit bien que l’écologie déshumanisée confine au fascisme. Je n’ai pas donné de nom, car elle me fait très peur, vous aurez compris de qui je parle, même si je n’ai jamais giflé de femme de ma vie ni fait preuve de cruauté mentale. Si j’avais dû choisir entre les 2, j’aurais probablement choisi la gifle qui reste si on est honnête du domaine de l’humain. Que ceux qui n’ont jamais été tentés de passer à l’acte jette la première pierre ! Et ceux qui n’en ont jamais reçue une peuvent s’y joindre.

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      • Nous allons tout droit vers l’écototalitarisme, qui se pare de vertus que trop de gogos prennent hélas pour argent comptant. Alors qu’en réalité, il n’est qu’une forme modernisée du totalitarisme le plus strict, d’où d’ailleurs sa proximité avec les gauchistes les plus outranciers (Mélanchon, etc.) ce qui est un comble quand on se doit de constater que la plupart des militants de ces mouvements, y compris celle que vous citez, sont des bobos vivant bien à l’abri des difficultés de ceux qu’ils traitent avec le plus grand mépris (agriculteurs notamment).

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