Le stockage d’énergie par batterie : un avenir prometteur ? 

Le stockage d’énergie par batterie est au cœur des enjeux actuels liés à la transition énergétique et les signes de frémissement de la filière française sont nombreux : lois, appels à projets, expérimentations, investissements, positionnement d’acteurs, développement de solutions innovantes. Même s’il subsiste de nombreux freins au développement du stockage par batterie en France, des conditions de plus en plus favorables émergent, véritables signes d’espoir pour la filière.

Le stockage par batterie rend de nombreux services aux acteurs du système électrique

Le stockage d’énergie par batterie est actuellement l’une des briques manquantes des réseaux dits « intelligents » ou Smart Grids, des réseaux capables d’intégrer efficacement les nouveaux modes de production et de consommation, en exploitant le potentiel des nouvelles technologies de l’information et de la communication.

Les installations de stockage par batterie peuvent rendre une multitude de services aux différents acteurs du système électrique (producteurs d’énergies renouvelables, gestionnaires de réseau de transport et de distribution, responsables de l’équilibre offre/demande, opérateurs de marché, consommateurs particuliers et industriels), notamment :

  • La réduction de la facture énergétique, via la diminution des pics de consommation coûteux pour le système électrique (limitation du besoin de renforcement des réseaux et moindre mobilisation de moyens de production thermique très polluants) ;
  • La sécurisation de l’approvisionnement électrique, y compris pour les réseaux isolés, via la fourniture de services liés à la continuité d’alimentation pour des sites dits « électrosensibles » (e.g. hôpitaux, aéroports) et des services liés à la régulation de tension et de fréquence à des fins de stabilité du réseau;
  • La valorisation optimale des actifs de production, via la possibilité pour un producteur d’énergies renouvelables de maîtriser les fluctuations de sa production d’électricité, et d’en optimiser la revente. À son échelle, un particulier peut également mieux valoriser sa production solaire photovoltaïque en maximisant son autoconsommation.

En France, des conditions de plus en plus favorables au développement du stockage par batterie

Plusieurs freins techniques, organisationnels, administratifs mais surtout économiques empêchent actuellement le développement à grande échelle du stockage par batterie en France métropolitaine. En effet, le coût des batteries est encore trop élevé et le prix de l’électricité encore trop bas pour envisager la rentabilité du stockage par batterie à court ou moyen terme. Cependant, la baisse rapide du coût des batteries Lithium-Ion (utilisées dans les véhicules électriques), la hausse continue du prix de l’électricité et les évolutions réglementaires réalisées ou attendues vont dans le sens d’une amélioration de la rentabilité du stockage par batterie. Ainsi, de nombreuses initiatives ont été prises dans le pays ces dernières années, portées par le Gouvernement ou par des acteurs industriels.

Le Gouvernement français, via des appels offres, le lancement du programme de la Nouvelle France Industrielle et des évolutions réglementaires (e.g. loi n°2017-227 du 24 février 2017 relative à l’autoconsommation), offre un cadre favorable à l’essor de la filière française du stockage. Ce cadre permet aux acteurs académiques et industriels français, performants dans le domaine du stockage d’énergie, d’engager de nombreuses initiatives. Ainsi, plusieurs expérimentations incluant du stockage par batterie ont été lancées : en zones insulaires tout d’abord, avec les projets Pegase à la Réunion (EDF) et Myrte en Corse (CEA, Areva) ; puis en métropole, avec les projets Nice Grid et Venteea (Enedis), IssyGrid (Bouygues Immobilier) et plus récemment la solution Ringo (RTE). Par ailleurs, des investissements conséquents ont été réalisés de la part de plusieurs grands groupes, comme par exemple l’acquisition du constructeur de batteries Saft par le groupe Total en 2016. L’effervescence autour du stockage fait également émerger tout un écosystème de start-ups innovantes, actives en France comme à l’international, en particulier dans le domaine de la gestion intelligente de l’énergie au sein du bâtiment ou d’un réseau local.

Plusieurs marchés cibles pour les acteurs français du stockage par batterie

La filière émergente autour du stockage par batterie a devant elle de nombreuses perspectives de développement. En effet, le stockage par batterie est lié à plusieurs marchés, eux aussi en plein essor, en France comme à l’international :

  • Le marché de la mobilité électrique : les batteries de véhicules électriques peuvent être recyclées pour des usages stationnaires, notamment domestiques à l’instar du projet Européen ELSA piloté par Bouygues Energies & Services ;
  • Les marchés de l’hydrogène : une filière associée à la transition énergétique dont les perspectives sont multiples. Une fois produit et stocké, l’hydrogène  peut être utilisé dans une pile à combustible pour produire de l’électricité, alimenter des véhicules via des stations d’hydrogène, être réinjecté dans les réseaux de gaz naturel ou encore utilisé directement dans certains procédés industriels. Sylfen, une start-up grenobloise, a ainsi développé une offre innovante basé sur une solution de production d’électricité locale associée à un stockage sous forme d’hydrogène ;
  • Le marché des « micro-grids », des réseaux isolés de petite taille dans lesquels s’intègre du stockage par batterie, par exemple en zone insulaire (e.g. îles européennes, Cuba, Indonésie, Malaisie) et en zones rurales isolées (e.g. Mali, Côte d’Ivoire) ;
  • Plusieurs marchés de niche en France : la sécurisation de l’approvisionnement électrique et l’intégration des énergies renouvelables en zones insulaires, et les projets de bâtiments « intelligents » ou plus largement d’éco-quartiers. Ces éco-quartiers sont des expérimentations portées par des collectivités territoriales (chargées de l’organisation et du pilotage de la transition énergétique au niveau local) et peuvent par exemple inclure de la production locale photovoltaïque, de l’autoconsommation (individuelle ou collective) et des véhicules électriques.

Les enjeux et les perspectives de la filière

L’enjeu principal pour la filière française du stockage par batterie est de faire émerger des champions nationaux, en particulier dans la fourniture de systèmes et de services associés à l’actif de stockage, en exploitant les compétences et expériences des acteurs académiques et industriels français. Dans le domaine de la fabrication des batteries, il sera a priori difficile de concurrencer les acteurs étrangers, notamment américains et asiatiques, déjà positionnés sur ce segment.

Afin de mettre en œuvre une stratégie industrielle en la matière et déployer le stockage par batterie à grande échelle d’ici 2030, plusieurs objectifs techniques, économiques, organisationnels, législatifs et académiques doivent être poursuivis. Pour les atteindre, un certain nombre d’actions pourraient être menées :

  • Déployer le stockage là où il est déjà rentable, notamment en zones insulaires ;
  • Définir le rôle du stockage pour donner une meilleure visibilité aux acteurs impliqués à l’aide d’une consultation publique de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) sur le thème des flexibilités ;
  • Identifier les facteurs clés de succès du déploiement généralisé du stockage en métropole, notamment les modèles d’affaires et de collaboration viables. Ceux-ci peuvent être issus des retours d’expériences détaillés des différents démonstrateurs ;
  • Identifier les modèles de soutien et de développement de la filière, via des objectifs nationaux voire par des moyens législatifs pour le développement de certains services rendus par le stockage particulièrement prometteurs ;
  • Concevoir, organiser et conduire des formations dédiées au stockage dans les universités et les écoles d’ingénieurs.

De nombreuses parties prenantes plaident aujourd’hui pour un soutien de la puissance publique pour les segments de marché les plus prometteurs, soutien qui représenterait un levier de développement au service d’une stratégie long terme créatrice d’emplois, de croissance et de compétitivité.

Cette tribune reprend la vision développée par Yélé Consulting dans sa publication du 27 avril 2017, « Le stockage d’énergie par batterie : un avenir prometteur ? », dont les auteurs sont Benjamin Cano, Caroline Dornstetter, Rémi Gilliotte et Alexandra Perrin.

 Le compte Twitter de Benjamin Cano

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