L’impréparation du développement de la voiture électrique en Europe

Tribune signée Jean-Pierre Schaeken Willemaers, ingénieur 

Le déploiement des réseaux de stations de recharge des batteries est un enjeu majeur qui conditionne le succès des voitures électriques bien plus que la disponibilité de l’importante fourniture électrique requise. La plupart des automobilistes considèrent même que c’est le principal frein à l’achat de celles-ci.

Alors qu’un parc de voitures totalement électrique ne sera une réalité que dans quelques décennies (pour autant que ce soit possible), un réseau de recharge performant est une urgence.

Pour permettre une pénétration massive et efficace des VE et rendre ces dernières attrayantes pour les consommateurs, plusieurs défis doivent être adressés :

Une programmation simple et rapide des déplacements afin d’éviter la panne,  ce qui n’est pas possible actuellement vu le manque flagrant de points de charge.

La question ne se pose pas pour les stations-service classiques (essence et diesel) vu qu’elles sont très nombreuses,  bien réparties sur tout le territoire et annoncées tout le long du parcours, surtout sur les grandes routes et les autostrades.

L’installation à grande échelle de bornes à recharge rapide, voire ultrarapide. Nombre de stations en sont totalement dépourvues. Les promoteurs de voitures électriques ont mal intégré, voire négligé le déploiement de réseaux de recharge performants (essentiels pour le déploiement des VE), obnubilés par leur souci de supprimer l’usage des voitures thermiques le plus rapidement possible.

L’amélioration de l’interopérabilité

Il y a trop d’applications et de cartes géographiques différentes. Une harmonisation s’avère nécessaire.

D’autre part, il est aberrant de ne pouvoir utiliser un point de charge parce qu’il est exploité par un fournisseur auprès duquel le client n’est pas enregistré.

Comment réagirait-on si une pompe Shell ou Esso refusait de servir l’automobiliste qui n’a pas de compte chez elles ?

Les quelques défis énumérés ci-dessus ont des implications psychologiques pour les consommateurs, dont l’anxiety mileage range, la peur de la batterie complètement déchargée.

Quelque 3 millions de bornes publiques de recharge seront nécessaires pour alimenter les dizaines de millions de véhicules électriques à l’horizon 2030 si l’Union européenne veut devenir climatiquement neutre d’ici à 2050, selon Lucien Mathieu, analyste chez T&E (groupe de recherche Transport et Environnement). On est loin du compte pour l’instant.

Dans une lettre envoyée en février 2021, l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA, T&E et le bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) ont demandé aux commissaires européens chargés du climat, des transports, de l’industrie et de l’énergie de profiter de la révision de la loi sur les infrastructures pour les carburants de substitution prévue en 2021 pour exiger la mise en place d’un million de bornes publiques de recharge  dans l’ensemble de l’Union en 2024 et de 3 millions en 2029.

Big data, la clé

Les bornes de recharge (en milliers) début 2020, en 2025 et 2030 :

La France, pourtant favorable au déploiement des voitures électriques comme à toutes initiatives contribuant à limiter les émissions de GES, n’échappe pas aux manquements

précités (en particulier, un trop faible développement des infrastructures de recharge) comme d’ailleurs la plupart des pays européens.

C’est ce que souligne l’Avere, l’association nationale française pour le développement de la mobilité.

La France comptait, fin 2020, 28 928 points de charge sur l’ensemble du territoire, c’est-à-dire pour un parc de 295 000 VE, un point de recharge pour 10 d’entre eux, ou pour 13 véhicules si l’on inclut les plus de 97 000 hybrides rechargeables immatriculés en France.

L’objectif du gouvernement est d’atteindre les 100 000 en 2021 ! D’autre part, les points de charge rapide restent encore très minoritaires.

Pour pallier l’effet dissuasif de ces contraintes, il est nécessaire, pour une exploitation efficace des réseaux de bornes de charge, de se tourner vers une approche fondée sur le big data.

Utilisant les données historiques de charges et de comportements des usagers, les algorithmes ML (Machine Learning) peuvent être utilisés, après apprentissage à partir de ces données, pour élaborer des programmations efficaces de planification de la recharge des batteries des VE et du guidage de ce dernier vers la borne la plus proche

L’Europe a pris du retard dans ce domaine : le déploiement de l’infrastructure de recharge publique n’est pas à la mesure de ses ambitions d’électrification du parc automobile, tant s’en faut.

Sans la mise en place rapide d’une telle infrastructure, les automobilistes européens ne sont pas incités à adopter la voiture électrique ce qui met en péril le projet de la Commission.

 

Source : Transport & Environnement

commentaires

COMMENTAIRES

  • N’y a-t-il pas un risque de dérive à l’instar de la Norvège ? https://www.transitionsenergies.com/voitures-electriques-anti-modele-norvegien/. Et pour une production fiable et économique d’électricité, le problème se posera d’ici peu. Encore de l’impréparation car avec la progression des énergies variables, la stabilité et la sécurité du réseau devront être maintenues. Le problème est de taille en Allemagne et souligné récemment par la Cours des Comptes Allemande.

    Répondre
  • EH OUI tant qu’on ne sera pas certain de trouver une borne de recharge rapide eventuelt via un appli. Onne changera pas de voiture.
    Et puis on ne comprend rien avec tous ces chargeurs compatibes ou pas.
    PourUOI ne pas utiliser simplement ,les station service existantes ?? ??

    Répondre
  • Bonjour,
    Les gouvernements veulent imposer aux constructeurs et aux clients , le véhicule électrique, sans prendre en compte l’agenda technologique : le moteur électrique est prêt , la batterie à 200 Wh / Kg n’est pas un produit automobile : autonomie insuffisante.
    Pas de clientèle VE, pas d’investisseurs recharge.
    C’est une escroquerie, qu’annoncer 480 Km d’autonomie et ne pas dépasser 200 Km sur autoroute quand il neige, comme l’expliquait un acheteur de VE haut de gamme à Pascal Praud sur C news.
    La R&D batterie doit précéder : Il faut atteindre 500 à 600 Wh / Kg pour lancer une production de masse VE. Sinon, c’est le « Wattheuregate »…La recharge viendra ensuite…Arrêtons de prendre le problème à l’envers.
    Jean Coudre ex Président Section technique Moteurs et Carburants SIA.

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