« Les réacteurs de quatrième génération sont conçus pour être durables »
Le Monde de l’Énergie ouvre ses colonnes aux experts de newcleo, start-up britannique spécialisée dans le nucléaire de quatrième génération, pour évoquer avec eux l’actualité et l’avenir de ces réacteurs.
Le Monde de l’Énergie —Pouvez-vous nous présenter les grands principes derrière la quatrième génération de réacteurs nucléaires ?
newcleo —Les réacteurs de quatrième génération représentent une avancée significative dans le domaine de l’énergie nucléaire, intégrant des progrès technologiques majeurs et répondant à des critères précis définis par le Generation IV International Forum (GIF). Ces critères visent à assurer la durabilité, la sûreté nucléaire, et la résistance à la prolifération nucléaire, tout en minimisant les déchets.
D’abord, ces réacteurs sont conçus pour être durables, capables de produire de l’énergie de manière efficace à partir d’uranium appauvri et de plutonium déjà présents sur le sol français, ce qui réduit la dépendance aux ressources externes. Contrairement aux réacteurs de puissance standards, ils peuvent recycler les matières nucléaires issues du monde de l’industrie nucléaire actuelle.
En termes de sûreté nucléaire, ils sont équipés de systèmes conçus pour limiter au maximum les conséquences d’un accident grave. Les réacteurs sont conçus de manière à éviter tout rejet de matières radioactives vers l’extérieur, même en cas de dysfonctionnement interne ou d’événement extérieur tel qu’un tremblement de terre.
Ils se caractérisent aussi par leur taille réduite et leur modularité, favorisant la fabrication en usine par modules transportables. Cette approche présente des avantages en termes de coûts, de sûreté simplifiée, et de flexibilité, répondant ainsi aux besoins actuels de décarbonation et de production d’électricité, de vapeur, de chaleur ou autres pour des industries diverses, notamment dans un contexte de demande croissante en énergie.
La majorité des projets de réacteurs de quatrième génération visent à atteindre la maturité technique d’ici 2030. Le déploiement de ces réacteurs est soutenu par des initiatives telles que France 2030, suscitant un intérêt international croissant pour cette technologie prometteuse qui pourrait jouer un rôle crucial dans la transition vers une énergie plus propre et plus durable.
Le Monde de l’Énergie —Où en est le développement de ces réacteurs dans le monde (réacteurs en service, en cours de construction, en projet ou arrêté) ?
newcleo —Il faut d’abord distinguer les différents types de réacteurs qui existent. En complément des réacteurs à eau pressurisée (REP), qui constituent le parc nucléaire français actuel, et leur version optimisée et améliorée, les EPR [nucléaire de 3ème génération, NDLR] , plusieurs entreprises développent des réacteurs de petite taille (SMR – Small Modular Reactor). Les SMR ont généralement une puissance électrique inférieure à 300 MWe. Conçus pour être fabriqués en série en usine et transportés sur un site d’installation, ils sont plus compétitifs que les réacteurs traditionnels. Leur investissement en capital réduit et leur capacité d’implantation plus flexible permettent leur développement par l’industrie privée.
Parmi ces SMR, certains utilisent la technologie traditionnelle, de troisième génération, sur laquelle reposent les réacteurs actuellement en service en France. D’autres reposent sur des technologies nouvelles, dites de 4e génération, et sont alors appelés AMR (Advanced Modular Reactor).
Plusieurs projets de réacteurs AMR sont en cours à travers le monde, à l’image de celui de newcleo qui est un petit réacteur à neutrons rapides refroidi au plomb. Notre technologie s’appuie entre autres sur le savoir-faire et l’expertise développés grâce à des projets comme Superphénix, le réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium d’une puissance de 1 200 Mwe, mis en service dans les années 80 en France puis arrêté en 1998.
Ces différentes technologies sont complémentaires et nécessaires pour pouvoir répondre au besoin urgent d’une source d’énergie décarbonée et abondante, et faire face à une demande qui ne cesse de croître
Le Monde de l’Énergie —Sur quelle technologie de 4ème génération s’appuie newcleo, et pourquoi ? Quel est le calendrier de déploiement prévisionnel des premières unités ?
newcleo —newcleo développe donc un Lead Fast Reactor (LFR), un réacteur à neutrons rapides utilisant le plomb comme caloporteur, pour répondre aux défis majeurs de l’industrie nucléaire : les déchets, la sûreté, les coûts et la souveraineté énergétique.
En matière de déchets, les LFR de newcleo fissionnent efficacement des matières nucléaires valorisables [notamment les déchets de fusion fissibles des réacteurs de 3ème génération, uranium appauvri et plutonium, dont la France possède d’importants stocks, NDLR] , permettant ainsi d’avoir une approche durable en contribuant à fermer le cycle du combustible et contribuent également à renforcer l’indépendance énergétique du pays.
Concernant la sécurité, les réacteurs refroidis au plomb fonctionnent à pression atmosphérique, garantissant un niveau élevé de sûreté grâce aux propriétés du plomb et aux systèmes de sûreté passive. Le design ultra-compact du réacteur newcleo, optimisé sur deux décennies, promet une réduction significative des coûts grâce à la simplicité, la compacité, la modularité et un rendement énergétique élevé.
En termes de calendrier, newcleo prévoit un précurseur non-nucléaire en Italie en 2026, suivi d’un démonstrateur industriel de 30 MWe en France dès 2030. Le premier réacteur 200 MWe est attendu dans les deux années suivantes, avec une production en série estimée vers 2035. Parallèlement, une usine de production de combustible recyclé de type MOX-RNR est envisagée en France en 2030, contribuant à la gestion des matières radioactives et à la fermeture du cycle du combustible.
Le Monde de l’Énergie —Quelle place peut prendre le nucléaire (de 3ème ou 4ème génération) dans la production d’hydrogène décarboné, en France et dans le monde ?
newcleo —Les nouveaux projets de réacteurs peuvent constituer une solution rapide à court terme et facilement décentralisée pour répondre aux besoins énergétiques et contribuer au développement d’applications
non électrogènes, comme l’hydrogène ou la cogénération de chaleur.
Tout un monde d’applications nouvelles autour de l’énergie produite par les SMRs et AMRs est possible. L’approche de newcleo est prioritairement de produire de l’électricité décarbonée d’origine nucléaire, puis de favoriser le développement d’écosystèmes industriels inédits avec des partenaires français et européens de premier rang, ouvrant la voie à de nouveaux champs d’applications. Parmi nos objectifs, nous souhaitons rendre flexibles nos réacteurs nucléaires en leur permettant d’adapter leur production d’énergie au besoin du réseau via la production d’hydrogène.
Grâce aux technologies actuelles, l’hydrogène bas-carbone est principalement produit par électrolyse de l’eau avec des rendements estimés à 70%. Des technologies nouvelles en développement permettraient d’atteindre plus de 90% de rendement grâce à de hautes températures compatibles avec la cogénération nucléaire. La cogénération implique la production d’électricité bas-carbone ainsi que la récupération de la chaleur fatale.
Le Monde de l’Énergie —Quels projets de recherche menez-vous pour associer vos réacteurs à la production d’hydrogène ?
newcleo —Nous sommes très impliqués dans la recherche d’applications innovantes pour notre technologie, notamment la production d’hydrogène. Nous avons ainsi récemment annoncé un partenariat portant sur la production d’hydrogène neutre en carbone avec MAIRE, un groupe de technologie et d’ingénierie qui développe et met en œuvre des solutions innovantes pour permettre la transition énergétique, et ses filiales NextChem Tech and Tecnimont.
L’accord permettra le développement, sur une base exclusive, d’une étude conceptuelle pour la production d’hydrogène bas-carbone et de produits chimiques durables, grâce à la combinaison de la technologie nucléaire innovante de newcleo avec les technologies et l’expertise chimiques de MAIRE.
COMMENTAIRES
Tien ! Un chasseur de subventions…. c’est le moment de préparer la moisson, après avoir semer de belles promesses.
il convient évidemment d’en savoir un peu plus, mais il y a belle lurette que la démarche que j’affectionne, celle qui triomphait pendant les plus belles années de ma vie professionnelle, 1973-1985, crise mondiale du pétrole, le « Small is beautiful » , est à l’évidence une très bonne solution. Le fait de pouvoir les utiliser en cogénération change considérablement l’approche puisqu’elle ouvre tous les territoires français en diminuant drastiquement les besoins en eau de refroidissement, sans toutefois les éliminer totalement, mais quel progrès majeur !
Par ailleurs, elle est excellente en terme de distribution des moyens de production d’électricité sur tout le territoire, y compris les ZNI. Exit la centrale de Larivot en Guyane et ses diesel fonctionnant au e-fuel transporté par bateau avec un effet bénéfique sur la préservation de la mangrove. Autre effet bénéfique: on nous promet des évènements climatiques majeurs à court terme qui vont mettre à mal sinon nos centrales actuelles, mais le réseau de distribution oui à coup sûr. Il ne se passe pas une semaine sans que des dizaines voire des centaines de Milliers de français de métropole soient privées d’électricité et ce sans que l’on puisse encore parler d’évènements climatiques majeurs. On peut penser qu’un évènement climatique majeur ne pourra pas mettre à bas la totalité du réseau électrique français et que la distribution des moyens de production permettra au moins d’alimenter la moitié du territoire via la partie du réseau sain ilotée du reste.
Côté négatif, la sécurité, bof, est-ce vraiment un problème ? ça créera des emplois, et on en manque.
Bon, on met en route l’EPR déja construit, et on arrête l’hémorragie en attendant un retour à meilleure fortune. Que ça vienne de Grande Bretagne, peu importe, rien n’empêche les Français de travailler, et d’ailleurs ils travaillent aussi. « Small is beautiful » vous dis-je !
Oui, small is beautiful, et en cela Chopin, je crois beaucoup plus en vos machines à cramer les dechets aussi secs que locaux, produits par toute concentration humaine pour compenser les faiblesses des renouvelables variables, qu’à ces nouveaux mirages que l’on pare de toutes les qualités tant qu’on n’a pas réussi à en produire un seul, comme on le fait toujours et comme on l’a fait avec l’EPR !
Si le Projet de Newcleo marche cela contribuera peut-être à valoriser ce que certains appellent des déchets…
La France est un peu l’Arabie Saoudite de l’Uranium appauvri… Avec de jolis stocks… Idem avec le plutonium séparé du combustible usagé à La Hague… Certains peuvent en penser du mal mais c’est une réalité…
Si les pragmatiques anglais se mettent à faire beaucoup de centrales de 4G, cela peut garantir des revenus aux petits Français du Futur… Et comme bien des pays auront besoin d’une base de production fiable et pilotable, alors la 4G sera peut-être l’Avenir pour une partie de cette Base… Et nos « déchets » fonderont…
Quand on voit les interminables difficultés des EPR on ne peut que se féliciter de l’arrivée de ces nouveaux réacteurs .
Toutes leurs qualités l’emportent sur les systemes antérieurs .
@Sirius,
En Chine et en Finlande, les EPR tournent… Et les REX (retours d’Expérience) vont être là pour celui de Flamanville…
Par contre niveau qualité des process de construction, Flamanville a été déplorable… Mais dans certaines formes d’échecs on apprend aussi… pour mieux rebondir…
Je vous que chacun y voit un miracle en réponse à ses fantasmes. Un truc qui n’existe pas sera celui qui me débarassera des dechets dont je ne sais que faire…. c’est sûr, c’est ùmême sa vocation. Et un autre, catrastrophé par la preuve que le gros machin est aussi fragile que gros, en conclu qu’à l’autre extrémité de l’échelle le minusciule n’aura que de minuscules problèmes et inconvénients !
Des procesus intellectuels qui n’expriment qu’un désaroi devant la chute d’un dieu qu’on avait seulement mal habillé avec un costume trop grand alors qu’il est microscopique…. finalement on a compris pourquoi ça marchje pas, mais ON A LA SOLUTION MAINTENANT, IL SUFFISAIT DE FAIRE PETIT ! QUE N’Y AVONS NOUS PENSE PLUS TÖT ????
Monsieur Rochain a raison avec de petits raisonnements sommaires on résout tout sur le papier… Cf les ENRi et l’ENRisme…
Dans la vie réelle, cela reste encore à démontrer … Des annonces nouvelles qui s’amoncellent mais des objectifs de plus en plus ratés …
D’un autre côté, si on ne cherche pas, on ne trouve pas !
On attend de Rochain, qui visiblement critique tout ce qui touche au nucléaire, qu’il nous décrive dans le détail le modèle énergétique auquel il rêve, son coût et sa fiabilité, pour qu’on puisse l’aider à devenir lucide.
Car on ne fait pas du nucléaire par plaisir, mais par nécessité !
Rochain rêve d’un modèle Allemand basé sur beaucoup de renouvelables mais qui s’avère peu performant si les conditions météorologiques ne sont pas là : https://www.energy-charts.info/charts/power/chart.htm?l=fr&c=DE&legendItems=011111111111111111111111111110000000
En 2023, l’Allemagne n’a produit que 260,6 TWh d’électricité bas-carbone (268,8 en 2015) avec 8,6 TWh d’importations et la France 444,35 TWh d’électricité bas-carbone (513,60 en 2015) avec 50 TWh d’d’exportations.
@Cochelin,
Et si vous rajoutez les prix de marchés actuels aux heures de plein soleil qui sont déjà à 0 voir négatifs dans certains pays. Le délire des ENRinp (np pour Non Pilotable) va amener de sérieux retours de manivelles et des factures de plus en plus salées pour les petits consommateurs Européens car il faudra payer les prix garantis ET que les productions à prix négatifs (celles qui ne sont pas vendus dans les marchés à terme) soient rééquilibrés par des prix suffisamment rémunérateurs à d’autres heures…
De plus certains acteurs de marché vont « spéculer » dessus et cela risque de créer des cercles vicieux sur le prix de l’électricité (comme en 2022 où les marchés ont joué sur le « défaut » du Nucléaire Français, ce qui a couté une fortune à bien des entreprises et des consommateurs, mais a du faire la fortune de certains acteurs de Marché… – dont les Marchands de Gaz !).
Bon, ne soyons pas dupes, il s’agit ici d’un plaidoyer « pro domo » pour le produit Newcleo.
Outre le fait qu’il s’agit d’un pari technologique (la chimie du plomb est loin d’être au point), deux autres « détails » interrogent dans ce plaidoyer :
– L’affirmation que Newcleo « fissionne les déchets de fusion fissibles des réacteurs de 3ème génération ». Outre que c’est du charabia (fissionne les déchets de fusion ?), l’uranium même appauvri et surtout le plutonium ne sont pas des déchets ! Mais au contraire du combustible.
– L’affirmation de l' »avantage en termes de coût » de cet SMR ou AMR : rien n’a été encore montré dans ce domaine, il faudrait a minima citer des chiffres. Et parler du coût du MWh produit, et non pas du coût de construction du réacteur, évidemment moindre qu’un EPR par ex., mais il faut comparer ce qui est comparable : un SMR produit beaucoup moins d’énergie qu’un EPR !
Bonjour les amis ! Toujours à ferrailler devant un lectorat sensiblement confondu avec l’ensemble vide ?