RE 2020 : « la pompe à chaleur répond à l’enjeu de décarbonation du bâtiment »

Alors que la Réglementation environnementale 2020 ou RE 2020 fixera les niveaux de performances Energie et Carbone de tous les bâtiments neufs, les pompes à chaleur apparaissent comme une solution concrète à la décarbonation du secteur.

On a voulu en savoir un peu plus avec Eric Bataille, président de l’Association française pour les pompes à chaleur, l’AFPAC.

À l’initiative de l’association professionnelle pour les pompes à chaleur, les acteurs de la filière ont signé, le 6 novembre une charte de qualité. Quel est l’objectif de cette charte ?

L’idée de cette charte, qui est une initiative de l’AFPAC, est née après que les pouvoirs publics ont annoncé vouloir rénover le parc des vieilles chaudières. L’expérience a déjà démontré que des entreprises de tous horizons, notamment mal intentionnées ou moins qualifiées, pouvaient être intéressées par ce marché.

Nous avons ainsi tenté de regrouper tous les acteurs intéressés par ce marché qui est financé par les dispositifs d’économie d’énergie.

Parmi ces acteurs, on trouve les fournisseurs d’énergie, les entreprises de SAV et de maintenance, celles qui collectent les certificats d’économie d’énergie, les installateurs, les qualificateurs, les industriels et les distributeurs.

Nous leur avons proposé de s’engager sur une charte de bonne conduite pour assurer que les travaux de rénovation par pompe à chaleur se font sur des critères de durabilité, de performance et de qualité.

D’autre part, la charte vise à tenir à l’écart les entreprises malveillantes et donne des conseils aussi bien au niveau commercial que technique : c’est ce que nous appelons les 10 commandements. Un exemple : réaliser une étude thermique avant de faire un devis. Ce sont des règles de l’art et de bon sens.

Je précise que ce n’est pas une fin en soi mais il y a un comité de pilotage pour vérifier que tout se passe bien.

D’après le baromètre de l’association Qualit’EnR, les pompes à chaleur seraient le système de chauffage préféré des Français. Il se situe au 4e rang des énergies renouvelables les plus utilisées en France. Comment expliquez-vous cet engouement ?

Les pompes à chaleur ont un certain nombre de vertus. À commencer par le confort car elles privilégient du chauffage par basse température sans mouvement d’air. Elles peuvent, dans certains cas, et c’est de plus en plus demandé, faire du rafraîchissement.

Dans de très bonnes conditions, elles peuvent aussi faire de l’eau chaude sanitaire. Cerise sur le gâteau : elles sont très performantes en termes d’économies d’énergie.

Une pompe à chaleur va restituer 3 à 4 fois plus d’énergie qu’elle ne va en consommer. Aujourd’hui, même par très basses températures extérieures, les rendements restent largement positifs.

Dernier point : la pompe à chaleur, née dans les années 1970, est désormais un système fiable après quelques déboires sur le matériel au début. Toutes ces raisons font que c’est un mode de chauffage qui séduit.

La nouvelle réglementation environnementale des bâtiments neufs (RE 2020) devrait entrer en vigueur en 2020, avec l’objectif de neutralité carbone pour 2050. Les pompes à chaleur répondent-elles à cet enjeu de décarbonation du secteur ?

Elles y répondent très fortement, et ce pour plusieurs raisons. La première est qu’elles utilisent de l’électricité. Et il se trouve qu’en France, l’électricité est très largement décarbonée.

Un chiffre : en 2014, le taux de carbone pour produire de l’électricité, en France, affichait 44,3 grammes de CO2 contre 307,2 en moyenne, en Europe. Tout cela grâce à notre électricité qui est d’origine nucléaire. Et le futur mix énergétique avec une hausse des renouvelables devrait conforter cet état de fait.

Une fois qu’on a dit cela, on calcule le taux de contenu carbone de l’électricité utilisé par le chauffage. En 2005, l’Ademe a défini que le contenu carbone de l’électricité pour le chauffage était de 180 grammes.

Donc beaucoup plus que le contenu carbone moyen. Cette méthode de calcul par saisonnalité liée à l’usage est remise en cause, notamment par la direction générale Energie climat qui propose de plancher sur une méthode mensualisée qui donnerait un taux de l’ordre de 80 grammes pour le chauffage.

Un chiffre plus proche de la réalité. Il y a aujourd’hui une application disponible sur Internet qui calcule en temps réel le contenu carbone de l’électricité. Et on a constaté que, pendant l’hiver 2016, très froid, la moyenne était de l’ordre de 90 grammes.

Par conséquent, on voit bien qu’on a un contenu carbone de l’électricité pour le chauffage inférieur à 100 grammes, ce qui est très faible par rapport à un contenu d’origine fossile comme une chaudière au gaz ou au fioul. Sans oublier que dans la réalité, on va restituer 3 à 4 fois plus d’énergie utile.

La pompe à chaleur, à côté du biogaz ou du solaire, est ainsi une des solutions les plus matures sur le plan technique et économique.

Les solutions électriques couplées à la chaleur renouvelable représentent-t-elles le combo idéal à valoriser dans la future RE 2020 pour la construction neuve ?

On le pense, même s’il faut prendre en compte la faisabilité technique et économique. En maison individuelle, il est clair que la RT 2012 a ouvert la voie puisqu’il y a aujourd’hui plus de 50% des maisons individuelles neuves qui sont chauffées avec une pompe à chaleur.

En revanche, nous avons encore des voies de progrès en logements collectifs où la pompe à chaleur émerge sur la production d’eau sanitaire mais beaucoup moins sur le chauffage où l’on a des contraintes techniques d’implantation et économiques puisqu’il n’y a pas eu d’obligation réglementaire dans la RT 2012.

C’est la raison pour laquelle nous appelons de nos vœux qu’elle soit inscrite dans la RE 2020. L’idée est que cette obligation soit graduelle pour que les industriels s’adaptent au marché émergent.

Plus de 60 % des foyers français seraient encore équipés de systèmes de chauffage à énergies fossiles (fioul, gaz). Le gouvernement a annoncé la fin des chaudières à fioul en 2029. Les mesures d’accompagnement du gouvernement sont-elles suffisantes à vos yeux ?

Ces mesures d’accompagnement comme le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) ; les aides liées aux certificats d’économie d’énergie ou encore les aides de l’Anah sont extrêmement coûteuses pour le budget de l’Etat.

Raison pour laquelle elles sont réaménagées en 2020, comme par exemple le CITE pour les plus aisés, et les primes vont être plafonnées en montant pour les ménages les plus modestes. Si nous comprenons ces réaménagements, nous sommes néanmoins inquiets car les restes à charge pour les plus modestes pourraient en dissuader plus d’un à investir.

Autre inquiétude : jusqu’à maintenant, une grosse partie des dépenses faites au titre des crédits d’impôts étaient faites par les ménages les plus aisés qui, eux, du coup, ne vont plus avoir d’incitation en sortant du périmètre du crédit d’impôt.

L’Ademe, dans son scénario « Energie climat 2035-2050 », estime que, dans le bâtiment, les pompes à chaleur prendraient une position dominante devant la biomasse. Vous confirmez ces chiffres prometteurs ?

Ce scénario est plausible et je confirme ces chiffres d’autant que l’AFPAC a contribué à donner ses visions à l’administration qui ont été en partie reprises dans le projet de Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). C’est plausible dans la mesure où il y a ce parc de chaudières au fioul à remplacer.

Bien sûr, on ne va pas tout remplacer mais le parc se chiffre à 13 millions de chaudières. Sans oublier que via la RE2020, la part de la pompe à chaleur dans les logements neufs devrait progresser.

Et si nous poursuivons nos efforts à travers par exemple l’étiquetage d’efficacité énergétique du parc de chaudières, le scénario de l’Ademe peut devenir réalité. C’est clairement jouable.

 

 

 

 

 

 

 

 

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