Le méthane du lac Kivu, nouvelle source d’énergie du Rwanda

Situé à la frontière entre le Rwanda et la République démocratique du Congo (RDC), le lac Kivu se caractérise par la présence dans son sous-sol, d’importantes réserves de CO2 et de méthane. Si ces ressources constituent un véritable danger pour les populations alentours, l’entreprise américaine ContourGlobal a récemment lancé un programme d’exploitation commerciale de ce gisement. Au-delà des enjeux financiers d’un tel projet, cette exploitation devrait surtout permettre de limiter les risques d’éruption.

En effet, comme l’explique Matthieu Yalire, chercheur à l’Observatoire volcanologique de Goma, sur la rive congolaise du lac, les réserves en dioxyde de carbone (300 km3) et en méthane (60 km3) stockées sous le lac Kivu représentent un véritable danger. Ce gaz pourrait selon certains scénarios, provoquer une éruption limnique, à savoir, un dégazage brutal du CO2 ou du méthane dans l’atmosphère, comme ce fut le cas en 1986 près du lac Nyos au Cameroun ou plus de 1700 habitants avaient perdu la vie.

Si le lac Kivu est resté stable jusqu’à présent, il semble impératif de tout faire pour éviter une catastrophe qui pourrait coûter la vie à plus de deux millions de Rwandais et Congolais vivant aux abords du lac. Pour cela, plusieurs chercheurs ont émis la possibilité d’extraire le gaz du lac afin d’éviter une accumulation croissante pouvant mener à l’éruption. Mais si cette extraction permettrait effectivement de sécuriser la zone, elle favoriser également l’exploitation de cette immense ressource gazière.

Dans cette optique, la société américaine ContourGlobal, spécialisée dans la construction et la gestion de centrales électriques, a mis en place le projet KivuWatt destiné à transformer ces réserves menaçantes de gaz en source d’énergie commercialisable dans la région, et les enjeux sont ici considérables. Car si la nouvelle  installation pourra générer dans un premier temps plus de 25 MW d’électricité diffusés sur le réseau local, ContourGlobal estime qu’elle pourra à terme atteindre une capacité de production de 100 MW, soit l’équivalent de la production actuelle du Rwanda (115 MW en 2013). Distribuée sur l’ensemble du territoire, cette énergie abondante, pourrait ainsi aider grandement à améliorer le taux d’électrification du pays, encore très faible (18 %).

Sur le plan technique, le projet KivuWatt consiste dans le pompage des couches d’eau inférieures du lac fortement chargées en méthane. Une fois l’eau remontée à la surface, elle libère le gaz qui n’a plus qu’à être collecté. Le méthane sera alors transféré vers une centrale mis en place sur la rive tandis que le CO2 sera rejeté dans les profondeurs du lac.

Financé pour 45 % par des prêts d’institutions internationales d’aide publique au développement, et à hauteur de 200 millions de dollars par des capitaux privés, la première plateforme de pompage devrait être mise en service dès la fin de l’année 2014. ContourGlobal a signé une concession de 25 ans avec l’Etat rwandais et un accord avec EWSA, l’entreprise publique de production et distribution d’électricité au Rwanda, qui lui rachètera l’électricité produite durant cette même période.