Quand le froid fait escale au Texas…

Eclairage signé Jean-Pierre Riou, chroniqueur indépendant sur l’énergie, membre du bureau énergie du Collectif Science Technologies Actions.

Une vague de froid historique vient d’affecter les États-Unis mi-février.

Le Financial Times en a illustré la rigueur.

Des millions d’Américains ont alors souffert de coupures de courant dans de nombreux États. Le système électrique texan a été le plus affecté, en raison de son manque d’interconnexions et d’adaptation à de telles températures.

Alors que ce froid polaire entraînait un record de consommation, la production de gaz s’est effondrée à cause du gel et des incidents affectaient les centrales à charbon.

Le réacteur South Texas1 a arrêté sa production à cause d’un problème d’alimentation en eau. Selon le Washington Examiner, la raison en est que l’alimentation de cette centrale n’avait pas été prévue pour affronter de telles températures.

Après son arrêt automatique du 15 février, le réacteur n’est revenu sur le réseau que le 17, tandis que South Texas 2 avait conservé 100% de taux de charge durant la période, ainsi que les 2 autres réacteurs de la Région.

Quatre millions de Texans ont subi de longues coupures tournantes de courant et notamment d’eau potable, par manque d’alimentation électrique des installations de désinfection.

La situation s’est prolongée du 15 au 18 février, où les températures se sont enfin adoucies.

La production des 25 GW éoliens s’est effondrée à 2,6% de leur puissance installée au pire moment de la crise, en raison de l’absence de vent aggravée par le givre qui a paralysé de nombreuses éoliennes pour lesquelles on n’avait pas mieux anticipé ces températures glaciales.

D’après l’AIE, leur défaillance n’a pas été déterminante dans la faillite du système électrique pour la raison … qu’on ne comptait que sur 6 GW sur les 25 installés, même si la moyenne de 3 GW effectifs du 15 février est tombée à 0,65 GW au moment fatidique.

La gravité de la situation texane durant ces 3 jours doit interpeller les pouvoirs publics afin qu’ils nous en mettent à l’abri.Chacun n’en tirera, bien sûr, que les enseignements qui conforteront ses convictions.

Mais du moins le retour d’expérience doit amener à se poser les bonnes questions.

Quelles températures ?

Le premier enseignement est que le réchauffement global ne doit pas conduire à imaginer qu’un froid polaire ne peut définitivement plus s’abattre sur la France. Les différentes oscillations de l’Atlantique Nord doivent nous le confirmer. Ce froid n’entraîne pas seulement une augmentation de la consommation, mais risque d’affecter certains moyens de production. La baisse de la production éolienne semble notamment corrélée avec celle des températures.

(Source S. Zaka)

Quelles interconnexions ?

Si le Texas ne disposait pas d’interconnexions suffisantes avec les régions voisines, celles-ci ont majoritairement connu le même déficit au même moment et auraient été dans l’incapacité de lui venir en aide.

L’AIE mentionne en effet des coupures similaires sur le Southwest Power Pool (SPP), (parties del’Oklahoma, de l’Arkansas, du Missouri, du Kansas, du Nebraska et du Dakota du Sud,) et le Midcontinent ISO (MISO), (touchant la Louisiane, le Missouri, l’Illinois, l’Indiana, le Michigan, le Wisconsin, le Minnesota, l’Iowa et le Dakota du Nord). Le nord du Mexique ayant également procédé à des coupures pour 5 millions de clients.

Quelle sécurité ?

Si le propos de notre Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) est de ne pas mettre tous nos œufs dans le même panier pour raison de sécurité, il apparaît clairement que le panier des EnR est trop largement percé pour prétendre participer à toute sécurisation de ce type.

Car si la sécurisation de l’alimentation en eau du réacteur South Texas 1 aurait pu être anticipée, rien ne saurait empêcher l’absence de vent de se reproduire. Et les 5 GW nucléaires ont assuré bien davantage de courant que les 25 GW éoliens, malgré l’arrêt de South Texas 1 le soir du 15 février, quand le vent est tombé et que le soleil était couché.

(Source New York Times)

 Quelles technologies ?

La faillite de l’approvisionnement en gaz aurait pu être anticipée et évitée. Car le froid ne pose pas de problème en Russie qui l’affronte régulièrement. Ce qui ne remet pas en question le projet allemand de sortir du charbon et du nucléaire grâce à lui et au projet Nord Stream 2 qui divise l’Europe.

La seule question qui se pose à la France est celle du remplacement à long terme de ses réacteurs nucléaires. Car c’est en termes de puissance PILOTABLE installée que la question se pose aujourd’hui, et non en quantité d’éoliennes intermittentes, d’autant que celles que nous avons financées jusqu’alors seront hors d’usage d’ici là.

En tout état de cause, la violence de l’expérience texane doit rappeler aux décideurs leur responsabilité dans la sécurisation de notre système électrique.

commentaires

COMMENTAIRES

  • Bonjour, une grande partie de ma carrière professionnelle s’est déroulée dans la maintenance industrielle (je souhaitais de part mes capacités et mon bagage repousser mon entrée à la retraite, mais ça devait gêner les jeunes cons diplômés) et j’ai été dès 1986, un des premiers moniteurs de parapente (nécessaire bonne bonne connaissance des phénomènes atmosphériques). Je me suis marié (après de nombreux voyages) dans le delta du Mékong, où la mer refuse de monter, et où il peut faire frais aussi (depuis une quinzaine d’années, mais décembre 97 avait déjà été un signal). Enfin en 2015 j’ai mené à Genève un vaste chantier de solaire thermique, 115 panneaux qui viennent complémenter la chaudière hydrocarbures initiale. Ce genre d’installation par îlot d’habitations, non gigantique, gérable car locale, où les caissons thermiques demandent peu d’énergie grise à la construction et sont porteurs d’une grande longévité. Alors les pastèques (Vert à l’extérieur et rouge à l’intérieur) se promènent avec la corde au cou, tressée par leurs propres soins. Le Texas vient de le leur expliquer. Mais quand le Giec montre le glacier qui fond, l’idiot regarde le glacier qui fond.
    Et c’est ainsi que les pastèques moururent con-gelées.

    Répondre
  • C’est assourdissant de n’avoir aucun commentaire de « l’expert » Mr Rochain sur ce sujet très explicite.
    En Europe et aussi en France, nous allons dans un proche avenir risquer des pannes générales au gré des fermetures des moyens de production pilotables que sont les centrales nucléaires et thermiques. C’est d’autant plus vrai que les usages de l’électricité vont croissants.

    Répondre
  • Encore un article mal documenté, biaisé et fallacieux de Jean Pierre Riou qui avec son compère très tôt retraité militaire Michel Gay – qui pour rappel n’ont chacun aucune spécialisation en énergie et ne s’intéressent jamais aux évolutions technologiques comme si les choses étaient limitées et fixées d’avance – passent leur temps à faire du lobbying et de la désinformation, ce qui ne fait évidemment pas du tout avancer une approche objective, intelligente et indépendante de l’énergie qui est pourtant essentielle pour être efficace et dont on aurait pourtant besoin notamment en terme d’indépendance énergétique qui piétine dans un monde où les tensions sur l’énergie et ressources sont toujours présentes.

    Pour mémoire les renouvelables ne sont pas seulement de l’éolien et du solaire et une énergie n’est pas uniquement centralisée. Il y a de multiples technologies et approche et heureusement que pendant que nos 2 pieds nickelés passent leur temps à pondre des articles de désinformation, d’autres travaillent sérieusement !

    Au Texas c’est le gaz naturel, le charbon et le nucléaire qui fournissent l’essentiel de l’électricité et ce sont les principales causes des pannes de courant.

    L’opérateur de réseau du Texas (Electric Reliability Council of Texas – Ercot), qui exploite le réseau électrique de l’État, a souligné que sur les 45 GW d’électricité qui étaient hors ligne, environ 30 étaient des sources thermiques – gaz, charbon et nucléaires – et 16 provenaient de sources renouvelables.

    Les arrêts éoliens ont représenté 3,6 à 4,5 GW – soit moins de 13% – des 30 à 35 GW des pannes totales. C’est en outre en partie parce que l’éolien ne représente que 25% du mix énergétique de l’État à cette période de l’année.

    Alors que l’éolien peut parfois produire jusqu’à 60% de l’électricité totale au Texas, la ressource a tendance à baisser en hiver, en conséquence l’exploitant du réseau suppose généralement que les turbines ne produiront qu’environ 19% à 43% de leur puissance maximale.

    Le charbon, le gaz naturel et l’énergie nucléaire – les soi-disant sources pilotables par tous temps – ont perdu au moins 26 GW de production, selon Jesse Jenkins, professeur d’ingénierie à l’Université de Princeton. Au total, les pertes de puissance ont plus que doublé les projections les plus extrêmes d’Ercot.

    Cet opérateur a donc confirmé, à juste titre, que les pannes des systèmes gaz naturel, charbon et nucléaire ont été responsables de près de deux fois plus de pannes que les énergies renouvelables.

    Les équipements gelés dans les centrales au gaz, au charbon et nucléaires figuraient parmi les principaux problèmes a souligné Ercot, qui me semble plus qualifié et disposer de meilleures données que notre lobbyiste retraité Jean Pierre Riou !

    La Commission fédérale de régulation de l’énergie a confirmé que les éoliennes fonctionnaient à des niveaux supérieurs à la normale malgré une panne (moins 13%) pendant le gel. Il n’y a aucune mention d’arrêt solaire.

    L’infrastructure gaz naturel a échoué à un rythme plus élevé et à une échelle beaucoup plus grande mais si l’on évoque entre autres le cas du biogaz et biométhane ce n’est pas techniquement insurmontable.

    Par ailleurs le surplus d’électricité sur lequel le réseau peut compter dans des conditions extrêmes était tombée à moins de 10%, trois centrales au charbon et une centrale au gaz naturel étant forcé de prendre leur retraite. En juillet, la demande de pointe au Texas a atteint 71,44 GW, avec des réserves réelles de seulement 2 GW, soit juste une autre centrale électrique fermée.

    De plus le Texas est le seul à avoir son propre réseau. Les 48 autres Etats sont connectés aux réseaux d’interconnexion Est ou Ouest et peuvent utiliser des alimentations électriques à travers les lignes d’Etat si nécessaire. Et contrairement aux affirmations de Jean-Pierre Riou la réserve n’était pas de zéro.

    « Les performances de l’énergie éolienne et solaire sont bien en bas de la liste parmi les plus petits facteurs de la catastrophe », a estimé Daniel Cohan, professeur agrégé d’ingénierie environnementale à l’Université Rice. « Blâmer les énergies renouvelables pour les coupures de courant est vraiment un hareng rouge ».

    Et pour ce qui est de sentir très fort l’imposture permanente, Jean Pierre Riou et Michel Gay sont bel et bien 2 gros harengs rouges prêts à invoquer n’importe quelle argutie pour peu que ce soit contre les renouvelables, secteur qu’ils n’ont jamais amplement approfondi puisque ce n’est ni leur sujet ni formation ! C’est dommage car le secteur est très riche en technologies, solutions, innovations et perspectives.

    Intéressant également sur le cas assez typique du Texas, les scientifiques et ingénieurs du secteur (pas nos 2 vilains lobbyistes et affiliés non indépendants !) estiment que le simple fait d’appliquer un marché de capacité au Texas et en Californie, sans aborder le problème sous-jacent de la planification pour avoir suffisamment de production disponible pendant tous types de conditions météorologiques, ne résout pas les problèmes de déréglementation causés – çà ne rallume en effet pas le chauffage.

    La Commission fédérale de régulation de l’énergie avait mis en garde contre les risques consécutifs à un événement régional lié au temps froid dès 2011. Malheureusement les opérateurs déréglementés sont peu incités à investir dans l’hivernage ou la sécurité des sources d’énergie car les marchés sont localement économiquement étroits. Ces fournisseurs d’énergie ne dépenseront donc pas en résilience sur la seule chance qu’un événement sur vingt ans se produise.

    Le nœud du problème n’est donc pas spécifiquement les renouvelables mais avant tout les conditions météorologiques extrêmes et un réseau qui n’y était pas préparé pour plusieurs raisons.

    C’est notamment ce que pensent également, pour citer d’autres sources, Joshua Rhodes, chercheur en énergie à l’Université du Texas à Austin et Caitlin Smith, vice-présidente d’AB Power Advisors. Le Texas atteint généralement son pic de demande d’électricité en été et les systèmes électriques ne sont pas bien équipés pour faire face à ce type de demande en hiver.

    Le marché texan a été construit autour de la théorie selon laquelle les prix élevés et la volatilité du marché encourageraient l’investissement dans la production, atteignant ainsi l’adéquation des ressources. Mais quand un système est conçu pour fonctionner au bord de la pénurie et que les citoyens risquent de perdre la fourniture d’énergie au moment où ils en ont le plus besoin, c’est une défaillance du marché. Le marché fonctionne et aucun réseau n’aurait pu empêcher quelque chose comme ça.

    L’expérience texane de déréglementation de l’électricité a été longue, remontant à 2002. Le système est loin d’être simple. L’électricité au Texas est produite par plus de 650 centrales électriques différentes appartenant à diverses entreprises ou parfois à une seule. Une fois l’électricité produite, cinq grands services publics sont chargés de fournir de l’électricité aux clients sur 46 500 milles de lignes de transport. Cinq clients du Texas sur six sont libres de choisir leur fournisseur d’énergie au détail, ce qui signifie que l’entreprise qu’ils choisissent comme fournisseur de détail ne possède probablement pas les moyens de production et de transport d’électricité mais paie simplement pour contracter ces services.

    Le résultat pour les clients du Texas n’a pas toujours été clair. Certains clients ont économisé de l’argent grâce à la déréglementation, mais beaucoup ont été moins bien lotis. C’est parce que les texans des marchés déréglementés ont payé des prix moyens plus élevés que ceux des marchés réglementés. En fait, un rapport a montré que les clients du Texas auraient pu économiser 27 milliards de dollars de 2002 à 2016 s’ils avaient payé le même prix que les clients vivant dans des régions réglementées de l’État.

    Les projections pour l’été 2019 n’étaient pas meilleures, avec une marge de réserve de seulement 7,5% le président de la Texas Public Utilities Commission (PUC), DeAnn Walker, qualifiait déjà la situation de « très effrayante ». En 2001, juste un an avant que le Texas commémore la déréglementation dans la loi, la marge de réserve de 25% de l’État était la plus importante d’Amérique du Nord.

    Face aux tempêtes hivernales qui ont fait grimper la demande à un record saisonnier de 69,15 GW le jour de la Saint-Valentin, le réseau du Texas ne pouvait tout simplement pas répondre.

    Le système d’alimentation au Texas n’était pas vraiment conçu pour fournir de l’énergie aux clients. Il a été conçu pour générer des revenus pour le patchwork des entreprises qui choisissent de participer à son marché.

    Ce sont des entreprises qui collectent les factures des clients, mais qui n’ont aucune obligation de restaurer les lignes électriques en panne, car quelqu’un d’autre les possède. Des entreprises qui promettent la lune aux clients dans l’espoir de gagner des parts de marché, mais qui n’ont que peu ou pas d’intérêt dans ce qui arrivera aux communautés du Texas dans les décennies à venir.

    Compte tenu de ce modèle, il n’est guère étonnant que certains propriétaires de production d’énergie au Texas ne protègent pas leurs actifs contre les conditions météorologiques extrêmes.

    Enfin il serait bon de se préoccuper de ce qui n’a pas non plus disparu, ce sont les conflits et un terrorisme aggravé et ce n’est pas Michel Gay qui va stopper par exemple des missiles hypersoniques et autres sur des réacteurs nucléaires, cible énergétique régulièrement favorite dans les menaces notamment au Moyen-Orient.

    A titre de simple ordre d’idée, le rapport de la Cours des comptes dès 2012 citait déjà des chiffres non réactualisés de quelques 300 à 1000 milliards d’euros par réacteur nucléaire en cas d’accident majeur et EDF citait quelques 2 millions de personnes touchées en moyenne.

    En cas de canicule on peut également citer les nombreux réacteurs à l’arrêt en Europe y compris ceux en bordure de mer et la longue liste des réacteurs mal implantés face aux changements climatiques qui n’avaient pas été anticipés à l’époque de leur construction et auxquels il faut ajouter ceux sensibles par exemple aux tempêtes etc.

    L’énergie est un sujet trop sérieux pour le laisser à des militaires à la retraite et autre amateurs qui feraient mieux de se préoccuper de la véritable sécurité des centrales nucléaires en cas notamment de conflit qui sont un vrai jeu de quilles et réel talon d’Achille de la France, sans parler du fiasco en terme d’exportations comparé aux perspectives et chiffres d’affaires des renouvelables dans le monde captés par d’autres pays à nos dépens !

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