Pourquoi l’Europe s’est-elle rendue dépendante du gaz russe ?

L’éclairage de Christopher Destailleurs-Henry, Directeur de publication Objectif-Justice.

La question semble simple, la réponse quant à elle nécessite quelques explications. Partons du point de départ qui est celui de l’Europe et des pays qui la composent. La première information à disposer est celle de comprendre que le Vieux continent ne produit pas de pétrole et presque pas de gaz. Il dépend donc du reste du monde pour sa consommation d’énergie ; 60,7 % de sa consommation énergétique sont satisfaits par l’importation.

De plus, les pays européens entre eux ne sont pas logés à la même enseigne. La France, par exemple, n’est pas véritablement dépendante du géant russe puisque ses importations représentent entre 17 et 19 %, là où ce chiffre atteint les 65 % pour l’Allemagne ou encore 93 % pour l’Estonie, 95 % pour la Hongrie, et même 100 % pour la République tchèque et la Lettonie.

Ainsi, les importations de gaz russe selon l’Agence internationale de l’énergie (l’AIE) représentent 40 % de la consommation en Europe, qui est de loin la première destination à l’exportation du gaz russe.

La réponse à la question évoquée en titre serait toute trouvée, néanmoins il est nécessaire de développer ces arguments.

Une double dépendance ?

Si l’Europe est aujourd’hui dépendante de la Russie pour assouvir son besoin en gaz naturel, il ne faut pas oublier que nous retrouvons une certaine dépendance de l’autre côté du robinet.

Moscou dépend en effet de l’Union Européenne pour ses exportations. Plus précisément, cette énergie (considérée avec étonnement comme énergie durable de transition par la Commission européenne l’incluant dans la taxonomie[1] ) joue un rôle primordial dans l’équilibre budgétaire russe avec 23 % des recettes du pays[2] et ses exportations constituent pas moins de 37 % de sa production[3] ; cela nous laisse donc à penser qu’il s’agit d’une source de revenu indispensable aux finances publiques russes.

Et c’est peut-être la raison pour laquelle la Russie, consciente de cette dépendance européenne, programme depuis quelques années déjà une stratégie majeure en se tournant vers le marché asiatique afin de proposer sa production de gaz et de gaz naturel liquéfié notamment à la Chine.

En se détachant du continent européen, la Russie souhaite donc assurer ses arrières en cas de conflit avec l’Europe pour protéger ses finances voire même les renforcer avec de nouvelles alliances aux cotés de pays plus amicaux puisqu’également tournés vers le communisme.

Des énergies renouvelables coupables

Il ne serait cependant pas exact d’affirmer que cette dépendance européenne n’est due que par l’absence de production locale. En effet, l’Europe mise depuis quelques années sur le développement massif des énergies renouvelables tout en cumulant pour certaines nations, Allemagne en tête, arrêt brutal des centrales nucléaires. Ainsi, pour palier à l’intermittence des premières il est nécessaire pour ces pays de disposer d’une flexibilité permettant d’en limiter les inconvénients. Quoi de mieux que le gaz (d’autant plus lorsque l’atome a été écarté), puisqu’il se retrouve moins polluant que le charbon[4] et moins coûteux que le pétrole…

Les énergies renouvelables intermittentes et variables, comme l’éolien et le solaire photovoltaïque, ne peuvent pas, seules, alimenter un réseau électrique de puissance de façon stable et pilotable si leur caractère aléatoire n’est pas compensé.[5]

« Les pays comme l’Allemagne qui ferment leurs centrales nucléaires et annoncent les remplacer par l’éolien ou le solaire trompent le monde. En réalité, ils remplacent le nucléaire par le gaz, temporairement relayé par l’énergie éolienne quand le vent le décide, car il doit y en avoir suffisamment, mais pas beaucoup. Mais aussi par l’énergie solaire en période de plein soleil. Voilà qui explique clairement pourquoi jeudi dernier encore [03/02/2022] , les Français ont émis 72 g de CO2 par Kwh d’électricité et les Allemands en ont émis 362 g, soit 5 fois plus ! » [6]

Les pays européens qui ont décidé de favoriser une énergie intermittente se sont donc rendus dépendants d’une énergie fossile dont les besoins ne pouvaient être satisfaits que par le fournisseur russe.

Vers quelle issue ?

Maintenant que nous avons répondu à la question de savoir pourquoi cette dépendance européenne existe, il est nécessaire de savoir si l’Europe peut se passer du jour au lendemain du gaz russe et suivre les pas des États-Unis et de l’Angleterre qui ont décidé de pratiquer un embargo sur cette source d’énergie en provenance de la Russie.

Selon Fitch Ratings[7] , le volume d’importation de gaz russe par les gazoducs étaient supérieur à la totalité des exportations de gaz naturel liquéfié des États-Unis. Ainsi et à court terme, il serait donc particulièrement délicat de vouloir se passer des importations de gaz russe. L’Allemagne, encore elle, a refusé que l’Europe prenne une telle décision.

De nouveaux accords doivent donc émerger avec d’autres pays exportateurs tels la Norvège, les États-Unis, la Qatar, l’Azerbaïdjan voire même l’Algérie qui s’est déclarée prête à répondre à toute demande supplémentaire de gaz pour ses clients européens.

N’oublions pas que les exportations algériennes de pétrole et de gaz ont enregistré un important rebond, s’élevant à 24 milliards de dollars au cours les 10 premiers mois de l’année 2021, soit une augmentation de 62 % par rapport à la même période de l’an dernier, selon les chiffres de ministre de l’Énergie [8] .

En parallèle à cette guerre qui se déroule aujourd’hui en Ukraine, et qui impacte significativement nos pays par l’augmentation du prix du litre de carburant pour se déplacer, du prix du gaz pour se chauffer et demain du prix du blé pour se nourrir, un impact environnemental est à prévoir puisque les nations européennes les plus dépendantes seraient donc amenées à rouvrir leurs centrales à charbon, ce qui est déjà le cas chez notre voisin allemand, démontrant une fois encore la stratégie catastrophique germanique baptisée Energiewende.

 

________________________

[1] https://c-destailleurshenry.fr/taxonomie-le-nucleaire-et-le-gaz-comme-energies-durables/

[2] https://minfin.gov.ru/en/statistics/conbud/

[3] Revue statistique de l’énergie mondiale – édition 2021 : https://www.bp.com/content/dam/bp/business-sites/en/global/corporate/pdfs/energy-economics/statistical-review/bp-stats-review-2021-full-report.pdf

[4] Le gaz demeure tout de même à 443 gCO2e/kWh (là où le charbon est certes à 1 058 gCO2e/kWh mais où le nucléaire se retrouve lui à 6 gCO2e/kWh)

[5] Avis du 8 juillet 2021 disponible à cette adresse : https://www.academie-sciences.fr/pdf/rapport/20210614_avis_nucleaire.pdf

[6] https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/eolien-et-gaz-la-preuve-par-l-exemple-allemand-904562.html – 21/02/2022

[7] https://www.fitchratings.com/research/corporate-finance/geopolitical-tensions-add-to-european-gas-market-tightness-07-02-2022

[8] https://c-destailleurshenry.fr/le-gaz-algerien-une-carte-a-jouer-pour-leurope/

commentaires

COMMENTAIRES

  • On retrouve là le mensonge habituel selon lequel l’Allemagne aurait remplacé le nucléaire par le gaz (d’autres disent le charbon).

    Sur la base des statistiques d’années « normales » et les dernières de qualité « consolidée », nous voyons que l’Allemagne a fait baisser les fossiles plus que le nucléaire dans la production d’électricité, en remplaçant une partie de ces deux là (fissile et fossiles) par des énergies renouvelables.

    Entre 2010 et 2019, la production d’électricité nucléaire a baissé de 141 TWh à 75 TWh (-66 TWh) – celle du charbon et lignite de 262,9 TWh à 171,5 TWh (-91,4 TWh) – celle du fioul de 8,7 TWh à 4,8 TWh (-3,9 TWh) – le gaz naturel ayant à peine augmenté de 89,3 TWh à 90,0 TWh (+ 0,7 TWh).

    Au total, les fossiles ont baissé de 95 TWh (de 361 TWh à 266 TWh), plus que le nucléaire.

    Ce sont les énergies renouvelables qui ont permis cela, en passant de 105,2 TWh à 242,4 TWh (+137,2 TWh) en seulement neuf ans.

    Dans le même temps, le contenu carbone de l’électricité a baissé de 483 g CO2/kWh à 338 g CO2/kWh en Allemagne. En Europe, c’est de 341 à 275 g CO2/kWh avec une diminution simultanée de la production d’électricité nucléaire et fossile.

    Répondre
    • @Marguerite : Vous pouvez être contre le nucléaire pour tout un tas de raison (peur de la radioactivité, peur de l’accident, vous vendez des É ou des PPV…), mais il est étonnant de ne pas reconnaître une évidence concernant la très grande efficacité du N vis-à-vis des GES. Vos comptes n’y changent rien, quelle que soit la façon dont vous les présentez, l’accroissement important des ENRi en Allemagne ne permet que de passer d’un bilan très mauvais à mauvais, malgré d’énormes investissements. Aujourd’hui, 101g en France, 505 g au pays des ENRi, preuve que les ENRi ne sont pas capables d’améliorer significativement le bilan GES, même si elles ont ajouté 137,2 TWh en seulement 9 ans.

      Répondre
  • Merci Marguerite,
    D’autant qu’écrire
    « les Français ont émis 72 g de CO2 par Kwh d’électricité et les Allemands en ont émis 362 g, soit 5 fois plus !  »
    c’est omettre de faire la part de l’utilisation de cette électricité par l’industrie allemande qui est bien plus importante que celle française.
    À croire qu’en France, la seule industrie qui reste, c’est celle du nucléaire. Beurk.

    Répondre
  • Merci Marguerite, de votre travail précis et documenté.
    Sur le terrain des développements ENR il nous est souvent affirmé que l’Allemagne est certes championne de l’Eolien et du PV mais que c’est au prix d’une augmentation de leurs émissions CO², suite a la fermeture des centrales nuc Allemandes.
    Je savais cela faux mais vous nous donnez les valeurs précises.
    Bien cordialement
    Michel Vanquaethem

    Répondre
    • Aujourd’hui, France = 101 g de CO2/kWh, Allemagne = 505g. Fermer une source à 6 g pour la remplacer par des ENRi (entre 15 et 55 g d’après l’ADEME) couplées avec des sources à 1000 g et 500 g ne peut pas améliorer le bilan carbone. C’est le choix allemand qui est fait en connaissance de cause, les GES contre un sentiment de sécurité (vrai ou faux, c’est un autre problème). Le lien entre la fermeture des centrales N et la mauvaise performance GES, est pourtant trivial.

      Répondre
  • Les cueilleurs de cerises s’affairent à leur occupation favorite, les chiens aboient, la caravane passe … ce sont les choses de la vie.

    Certains se préoccupent du climat (un mal qui répand la terreur), du CO2, ce pelè, ce galeux d’où nous vient tout le mal, et veulent faire croire que le nucléaire serait la solution.

    La production d’électricité (seule) représente 20,4 % des émissions de CO2 dans le monde. En 2020, le nucléaire a produit 2.700 TWh d’électricité dans le monde sur un total de 26.820 TWh (10,1 %). Les fossiles ont produit 16.450 TWh, dont 9.420 TWh pour le charbon et associés.

    Remplacer la production de tous les fossiles par une production nucléaire nécessiterait de multiplier par 7,1 la production nucléaire actuelle. En combien de siècles ?

    Car l’expérience montre, en mettant 2020 de côté, que le nucléaire mondial n’a produit que 142 TWh de plus en 2019 qu’en 2001, soit 5,1 % de plus en 18 ans (2.796 TWh contre 2.654 TWh).

    Au lieu de cueillir des cerises, mieux vaut s’intéresser aux évolutions historiques sur plusieurs années.

    Répondre
  • Eh bien, dans les autres domaines, les choses ne se sont pas arrangées. Dans l’ensemble de vos commentaires, vous ne vous intéressez bien sûr qu’au secteur électrique. https://www.iea.org/reports/germany-2020

    « Pourtant, malgré les progrès réalisés dans la réduction des émissions globales, l’Allemagne a du mal à atteindre ses objectifs de réduction des émissions à court terme, en grande partie en raison de progrès inégaux entre les secteurs. Elle est confrontée à des défis notables dans les domaines du transport et du chauffage. Maintenant, le gouvernement doit recentrer ses efforts pour obtenir des réductions d’émissions plus fortes dans les secteurs en retard. Un plan d’action pour le climat récemment adopté, qui comprend un prix du carbone dans les secteurs des transports et du chauffage, représente un pas important dans la bonne direction.

    Dans sa transition énergétique jusqu’à présent, l’Allemagne a maintenu un degré élevé de sécurité d’approvisionnement en pétrole, en gaz naturel et en électricité. Les éliminations prévues du nucléaire et du charbon devraient accroître la dépendance du pays au gaz naturel, ce qui rend de plus en plus important de poursuivre les efforts visant à diversifier les options d’approvisionnement en gaz, y compris par le biais d’importations de gaz naturel liquéfié. »

    Répondre
  • La tribune de Christopher Destailleurs Henry est malheureusement comme beaucoup de tribunes non scientifiques du Monde de l’énergie bourrée d’erreurs, comme le relève notamment à juste titre Marguerite.

    On pourrait ajouter qu’au plan mondial les renouvelables mises en concurrence avec les fossiles les ont fait reculer quand le nucléaire piétine et n’est pas dans les temps climatiques et en particulier quand il s’agit de se couper des énergies fossiles russes.

    Que la Californie parmi d’autres, 5e puissance économique mondiale, après de nombreuses études, modélisations approfondies et concertations entre tous les opérateurs, a encore récemment relevé son niveau de renouvelables, visant 73% d’ici 2032 et 100% d’ici 2050 avec très peu de gaz (pourtant peu cher et disponible localement) et qui sert de modèle à d’autres Etats et pays.

    C’est sans compter aussi sur la forte croissance à 2 chiffres annuels du stockage longue durée LDES dont plusieurs pays ont bien compris les avantages, enjeux et marchés mondiaux (Etats-Unis, Chine, Royaume-Uni etc)

    Et des technologies comme la liquéfaction hydrothermale où les Pays-Bas ont pris une certaine avance et qui représente jusqu’à 140 TWh en France d’ici 2050. La pyrolyse qui représente le même potentiel en France. L’éléctrométhanogénèse qui permet l’utilisation des quelques 40% de C02 émis et perdus par les centrales biogaz et qui permettent autant de production d’énergie en plus à des prix d’autant plus bas. Et on peut continuer la liste des solutions à disposition immédiate ou toute proche.

    En outre quel intérêt d’écrire des tribunes (en plus erronées) sur le passé quand il y plus que jamais lieu d’avancer vers l’avenir avec des solutions crédibles, concrètes et rapides à déployer.

    Même si en temps que scientifique du secteur de l’énergie et étant plus exigeant sur les technologies employées et les méthodes qui soient les plus efficaces possibles pour les employer (ce qui n’a pas été une spécialité française depuis la mise en place du monopole électrique en 1946), je ne partage pas tout de l’étude suivante, elle a au moins le mérite de proposer des solutions et de les avoir modélisées et chiffrées au plan européen et allemand, c’est plus constructif que les sempiternelles tribunes du Monde de l’énergie qui passent leur temps à faire la promotion du nucléaire avec des arguments dignes du télé-achat et la plupart du temps écrites par des retraités non formés aux renouvelables alors que le secteur nucléaire français n’est même pas fichu de terminer dans les temps et coûts ses réacteurs.

    Au lieu de cibler en permanence l’Allemagne, en répétant qui plus est des âneries sans vérifier sérieusement et objectivement toutes les données, et qui a comme tout pays ses particularités dont il faut tenir compte pour tenter de la comparer avec d’autres, il serait plus utile de coopérer d’autant plus avec et avec nos nombreux autres partenaires, ce serait plus constructif et beaucoup plus efficace. Ce ne sont en outre pas les programmes et projets intelligents en énergie qui manquent en Europe notamment et qui semblent peu connus par nos « tribuns » qui feraient mieux d’étudier plus en profondeur et détails ces sujets avant d’écrire, çà serait en effet plus utile à tout le monde d’élever le niveau.

    Bruxelles, 24 mars 2022

    Cas de l’Allemagne :

    L’Allemagne peut économiser suffisamment d’énergie pour devenir presque indépendante du gaz russe d’ici cinq ans, mais pas totalement, selon une étude du groupe de réflexion Agora Energiewende, du cabinet de conseil Prognos et du Wuppertal Institut.

    Après avoir examiné plusieurs scénarios d’économies de gaz à court et à long terme, les chercheurs concluent que, d’ici 2027, une augmentation significative de l’efficacité énergétique, le développement des énergies renouvelables et l’électrification des processus industriels et du chauffage pourraient réduire la demande de gaz de l’Allemagne d’environ un cinquième, soit quelque 200 térawattheures.

    Cas de l’Union européenne (et éventuellement de l’Ukraine dont j’ai coupé la partie concernée puisque l’on ne connaît pas son devenir) :

    Par ailleurs, Agora Energiewende propose 15 actions pour RePowerEU afin de réduire la dépendance aux gaz fossiles et d’aider l’Union européenne à atteindre les objectifs climatiques en même temps. Un élément clé est un nouveau fonds de souveraineté énergétique de 100 milliards d’euros pour développer massivement les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique dans les États membres de l’UE.

    Un effort de crise concerté pour améliorer l’efficacité énergétique dans les bâtiments et l’industrie et développer les énergies renouvelables pourrait réduire de manière permanente la demande de gaz fossile dans l’UE de 1200 térawattheures au cours des cinq prochaines années.

    Cela permettrait à l’UE d’éviter 80 % des importations actuelles de gaz russe d’ici 2027 et permettrait un déplacement de 100 % de ces importations lorsqu’elles sont combinées avec des approvisionnements alternatifs tels que le GNL. Les actions prioritaires proposées pour le plan RePowerEU réduiraient 480 térawattheures d’utilisation de gaz fossile dans les bâtiments grâce à l’efficacité énergétique, au chauffage urbain et à une révolution des pompes à chaleur, 223 térawattheures dans l’industrie, notamment grâce à l’électrification dans les procédés thermiques à basse et moyenne température, et 500 térawattheures heures dans le secteur de l’électricité en augmentant la flexibilité du système et l’éolien et le solaire photovoltaïque au cours des cinq prochaines années.

    Ces économies représentent une réduction permanente de la consommation globale de gaz d’environ 32 % d’ici 2027, permettant à l’UE d’économiser entre 127 et 318 milliards d’euros sur les importations de gaz au cours de cette période. « Les mesures nécessaires pour réduire durablement la consommation de gaz fossile vont de pair avec ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs climatiques de l’UE », déclare Matthias Buck, directeur Europe d’Agora Energiewende. « L’UE doit maintenant s’assurer que RePowerEU accélère l’efficacité énergétique et l’expansion des énergies renouvelables pour atteindre la souveraineté énergétique d’ici 2027. »

    En tant qu’élément clé de la mise en œuvre de RePowerEU, Agora Energiewende propose un nouveau fonds de souveraineté énergétique de l’UE. Doté d’un montant initial de 100 milliards d’euros jusqu’en 2027, il ne devrait soutenir que les besoins d’investissement non couverts par les fonds européens existants, et surtout soutenir les États membres fragiles sur le plan budgétaire. « La réalisation de la souveraineté énergétique de l’UE nécessite la solidarité dans la prise en charge du financement public nécessaire », déclare Buck. « Les engagements autour de la mise en place d’un nouveau cadre de fonds de souveraineté énergétique devraient garantir que les fonds européens existants sont réaffectés dans la mesure du possible, et que les gouvernements combinent intelligemment les signaux de prix et la protection de l’industrie et des ménages à faible revenu. »

    Une révolution des pompes à chaleur est nécessaire pour les bâtiments en Europe

    Selon l’étude Agora qui s’appuie sur la modélisation réalisée par Artelys, TEP Energy et Wuppertal Institute, la consommation de gaz fossile dans le secteur des bâtiments (résidentiel et tertiaire) pourrait être réduite de 480 térawattheures d’ici 2027 par rapport aux 1400 térawattheures actuels. Cela peut se faire par des mesures telles que l’amélioration de l’efficacité des chaudières à gaz existantes ou leur remplacement par des pompes à chaleur, la priorité à la formation des installateurs, l’intensification rapide des rénovations de bâtiments pour les rendre plus efficaces et la connexion d’un plus grand nombre de logements aux réseaux de chauffage urbain.

    Si les systèmes de chauffage au gaz de plus de 15 ans sont rapidement remplacés par des pompes à chaleur, le chauffage urbain et, dans une mesure limitée, la biomasse, la consommation de gaz dans les bâtiments peut être massivement réduite de 312 térawattheures jusqu’en 2027. « Les gouvernements de l’UE doivent interdire l’installation de nouvelles chaudières à gaz et augmenter le soutien financier pour déclencher une révolution de la pompe à chaleur », déclare Buck. Les mesures viables comprennent des prêts bonifiés, une suppression temporaire de la TVA sur les pompes à chaleur et un amortissement accéléré des coûts d’investissement des pompes à chaleur pour les entreprises.

    L’électrification dans l’industrie peut permettre d’économiser au moins 223 térawattheures de gaz d’ici 2027

    L’industrie est responsable d’environ 20,5 % de la consommation annuelle de gaz fossile de l’UE en tant qu’énergie, et de 25 % si l’on inclut les matières premières. L’étude révèle qu’il est possible de réduire la demande de gaz fossile dans l’industrie d’au moins 223 térawattheures d’ici 2027. Les actions pour réaliser ces économies comprennent l’accélération de l’adoption des pompes à chaleur, l’expansion de l’électrification directe et des systèmes hybrides SER-combustibles fossiles pour les basses et moyennes énergies, le recyclage amélioré des matériaux à forte intensité énergétique. Le potentiel d’économies à court terme est particulièrement important dans les applications de chauffage à basse température qui représentent 40 % de la consommation de gaz industriels.

    La montée en puissance de l’éolien et du solaire photovoltaïque est essentielle pour atteindre la souveraineté énergétique en Europe

    Les éléments d’énergie renouvelable du paquet Fit-for-55 permettraient à l’Europe d’atteindre 427 GW de capacité éolienne installée et 383 GW de capacité solaire installée d’ici 2030. RePowerEU relève le niveau d’ambition de 90 GW supplémentaires, visant 480 GW d’énergie éolienne et solaire. 420 GW de capacité solaire d’ici 2030, dont 80 GW dédiés à la production supplémentaire d’hydrogène vert. Les nouveaux objectifs impliquent une multiplication par 2,5 de la capacité installée au cours des huit prochaines années.

    Avec des taux de déploiement actuels beaucoup plus faibles à travers l’Europe, une impulsion immédiate et globale est nécessaire : « Pour regagner la souveraineté énergétique, l’Europe doit faire évoluer les énergies renouvelables aussi vite que possible, en mettant tout en œuvre », déclare Matthias Buck. Alors que pour l’éolien terrestre et offshore, l’augmentation proposée de l’ambition est conforme à ce que l’industrie peut fournir, pour le solaire photovoltaïque, les analystes du marché et l’industrie solaire indiquent que jusqu’à 600 GW d’ici 2027 seraient réalisables. Une mise à l’échelle plus rapide devrait être combinée avec des efforts pour augmenter la fabrication d’éoliennes et de panneaux solaires photovoltaïques en Europe.

    Selon l’étude Agora, la mise en œuvre intégrale des lois de l’UE pour accroître la flexibilité du système électrique, l’investissement dans les réseaux et la recherche d’un équilibre entre l’électrification directe et la production d’hydrogène vert seront d’autres leviers importants.

    Actions immédiates pour réduire la consommation d’énergie fossile d’ici l’hiver 2022/23

    L’étude décrit également certaines des mesures immédiates qui peuvent être prises pour réduire la consommation de combustibles fossiles à l’approche de l’hiver 2022/23. Ces actions à court terme comprennent le changement de combustible dans le secteur de l’électricité, dans le chauffage urbain et dans les bâtiments, des améliorations à court terme de l’efficacité opérationnelle pour augmenter la production d’énergie éolienne et biomasse, et des investissements dans des mesures d’économie d’énergie à faible coût telles que l’isolation. En outre, l’UE devrait encourager les citoyens et les entreprises qui se chauffent au gaz à économiser de l’énergie par diverses méthodes, l’une d’entre elles étant une campagne de communication pour informer sur les potentiels d’économie d’énergie.

    Une autre action consiste à inciter l’industrie à économiser et à remplacer le gaz fossile dans les applications de chauffage à basse température. Une analyse récente d’Agora Energiewende et Prognos a estimé qu’entre 158 et 262 térawattheures de gaz fossile peuvent être économisés en utilisant de telles mesures à court terme rien qu’en Allemagne.

    Nécessité d’un effort collectif européen

    Tous les efforts pour reconquérir la souveraineté énergétique nécessiteront de la solidarité et un effort collectif européen basé sur des engagements communs. « Il est crucial que RePowerEU soit enraciné dans un cadre politique solide, dirigé par les chefs d’État de l’UE, pour garantir la mise en œuvre complète de toutes les actions ».

    L’impulsion intitulée « Regaining Europeʼs Energy Sovereignty: 15 Priority Actions for RePowerEU » a été rédigée par Agora Energiewende. La publication de 40 pages décrit les actions que l’UE peut entreprendre pour regagner sa souveraineté énergétique et réduire sa dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles importés. Il est disponible en téléchargement gratuit ci-dessous

    https://www.agora-energiewende.de/en/press/news-archive/investments-in-energy-efficiency-and-renewables-to-deliver-energy-sovereignty-for-europe-by-2027-1/

    .

    Répondre
    • Les causes profondes de la dépendance l’Europe, de chaque pays, au gaz , de toutes origines, ne résultent-elles pas de l’ application du principe de base du marché , « la concurrence libre et non faussée » ?: la recherche du moindre coût écarte les productions autonomes plus chères ( par exemple celle de gaz à partir du charbon: procédé Fischer Tropsch) qui auraient pourtant pu être maintenues en jouant sur les droits de douane.

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