Le bois énergie comme levier de gestion durable du bocage

Dans le cadre du salon Bio 360, dont nous sommes partenaires, nous avons voulu en savoir plus sur la filière bois énergie et l’équilibre économique des filières bois dans leur ensemble. Direction la Bretagne avec l’exemple du bocage et le décryptage de Marc Le Tréïs, animateur Plan bois Énergie Bretagne.

La place du bocage dans le bois énergie

Le bois énergie représente 6% de la consommation d’énergie bretonne mais 45% de la production d’énergie régionale. C’est la première énergie renouvelable bretonne. (Observatoire de l’environnement de Bretagne, 2020).

Parmi les valorisations possibles de l’arbre, la valorisation énergétique est aujourd’hui parmi les plus importantes, bien qu’elle n’ait pas la primauté au sein de la hiérarchie des usages du bois.

La biomasse utilisée par la filière bois énergie provient de différentes ressources (Figure 3): forestière, bocagère, industrielle et déchets et déchets verts. Elle est utilisée sous différentes formes : bûche (55%) en régression pour le secteur domestique, bois déchiqueté (27%) en progression pour les secteurs industriels, tertiaires et agricole et granulé (18%) en forte progression pour les secteurs domestiques mais aussi tertiaire.

Si la valorisation énergétique bretonne des forêts concerne 21% des coupes (DRAAF bretagne, 2020), sur le bocage, la valorisation en bois de chauffage est la forme majoritaire (PBEB, 2018).

Le bois énergie, un risque pour le bocage ?

Le développement de la valorisation énergétique de la haie n’est pas anodin et rencontre plusieurs freins et points de vigilance. Par exemple, il peut être parfois trop rapidement pointé du doigt comme une des causes de la disparition du bocage en Bretagne et de l’émission de particules dans l’air etc. ou simplement freiné par crainte d’une insuffisance de la ressource.

Mais, si certaines de ces craintes ont pu être alimentées par des actualités regrettables mais à chaque fois isolées bien que symptomatiques de dérive potentielle, la mobilisation de cette ressource peut aujourd’hui s’appuyer en Bretagne sur plusieurs outils tout au long de la filière, de la plantation (dispositif Breizh bocage), en passant par l’entretien (MAEC, Label « Haie ») et jusqu’à la valorisation énergétique (Plan Bois Energie Bretagne).

Ces outils sont le fruit du travail de nombreux acteurs du bocage depuis de nombreuses années et trouvent leur cohérence et enfin leur complémentarité.

Donc, non ! le bois énergie ne représente pas un risque pour le bocage, à condition d’utiliser les garde-fous existants cités plus haut, mais bien au contraire, il s’agit d’un levier pour le développement et l’entretien du bocage.

Pour mettre en place une gestion équilibrée du bocage sur le territoire, il convient de faire le lien entre les opérateurs en charge d’actionner localement ces différents outils au bénéfice des premiers intéressés que sont les agriculteurs.

Pour cela, il est nécessaire de réaliser un travail de sensibilisation sur les enjeux couverts par le sujet de la gestion durable du bocage et de sa valorisation énergétique sur le territoire et ses points de vigilances afin que les acteurs concernés s’en saisissent.

L’arbre bocager au centre des enjeux environnementaux, au carrefour des politiques publiques

La gestion de l’arbre et plus généralement du patrimoine arboré sur un territoire est un levier du développement durable (Ministère de l’Agriculture et de l’alimentation, 2016) et (Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, 2015) à la fois sur des enjeux environnementaux (paysage, biodiversité, santé, énergétique, stockage carbone, qualité des sols etc…), sociales (emploi local non délocalisable, résilience des systèmes, bien être etc…) et économiques (balance économique positive, renforcement de chaine de valeur ancrée sur le territoire, substitution de matériaux importés non biosourcés etc…).

Pour remporter le pari en exploitant au mieux cette ressource, deux conditions sont nécessaires, l’articulation des politiques publiques et l’intégration des préceptes de l’économie circulaire dans le cycle de gestion de la biomasse.

La gestion de l’arbre et plus généralement de la biomasse est encadrée aux niveaux national et régional par la réglementation et des outils de planification. Pour mener à bien la transition écologique, des passerelles ont été mises en place entre les enjeux de mobilisation de la biomasse et les autres enjeux territoriaux (Figure 1).

Aussi, si des liens existent théoriquement entre les documents de planification (Schéma régional de mobilisation de la biomasse, SRADDET etc…), cette articulation doit prendre corps au niveau local (par exemple au sein des programmes d’actions des PCAET) en associant les différentes politiques locales (aménagement, eau, économie, agriculture etc…) dans des actions transversales : Voici deux illustrations qui illustrent bien cette nécessité de décloisonner.

De la même façon qu’on ne peut couper des arbres dans la seule idée de produire de l’énergie sans prendre en compte toutes les autres fonctionnalités de l’arbre (au risque d’aboutir à un déséquilibre radical des peuplements), on ne peut pas planter avec comme objectif exclusif la gestion de la qualité de l’eau, sans prendre en compte la valorisation qui sera faite de l’arbre (au risque de voir des peuplements non valorisables et non entretenus).

L’arbre bocager, un moteur de l’économie circulaire sur le territoire

Gérer un patrimoine arboré appelle des moyens (des compétences, des outils, des coûts, du temps) et réussir le pari de la multifonctionnalité de l’arbre nécessite une connexion entre les enjeux et les acteurs locaux.

Pour garantir cet équilibre, la gestion de l’arbre doit donc se faire dans le cadre d’un triptyque plantation / entretien / valorisation où chaque étape doit associer les exigences et les intervenants des deux autres étapes (contrainte de qualité produit, prise en compte des coûts, complémentarité des usages et des fonctions, planification etc…).

Dans le cas de la gestion du bocage sur la ferme (Figure 2), la mise en place de ce principe de gestion permet d’aboutir à une valorisation vertueuse de l’arbre à la ferme au travers une cascade d’usages (climatique, matériaux, litière, agronomique, énergie). Ainsi, une fois le mécanisme de la gestion durable bien huilée, le bois énergie issu des haies devient une des composantes rémunératrices qui permet de réhabiliter l’arbre sur la ferme.

Une réhabilitation de l’arbre bocager sur la ferme

Le bois de bocage considéré est ici celui présent sur les fermes bretonnes, autour des parcelles cultivées et de prairies mais aussi dans les fonds de vallée, les ripisylves, bosquets, les bords de routes.

Rappelons au préalable la situation du bocage Breton (Observatoire de l’Environnement en Bretagne, 2018) : suite au remembrement qui a largement entamé le linéaire breton, le capital sur pied restant a été longtemps délaissé et l’objet d’une absence de gestion. Ceci s’explique par son absence de statut dans les premières générations de la PAC, mais aussi par le manque de débouchés économiques et le temps nécessaire, peu rémunéré, à consacrer à son entretien.

Le principal enjeu est donc de réhabiliter la place du bocage sur la ferme, au sein de l’agrosystème grâce à des leviers complémentaires et indissociables comme les outils de plantation, d’entretien et de valorisation.

La Figure 5 illustre deux exemples d’usages en cascade du bocage sur la ferme qui s’inscrivent dans la dynamique du bois énergie (production de déchiqueté en haut et de bois buche en bas) mais qui répondent à des enjeux de bien-être animal, de conservation des sols et de stockage carbone.

Comme quoi, démonstration faite encore une fois par l’exemple d’agriculteurs à l’écoute de leur agrosystème, qu’un arbre bien enraciné sur son territoire devient un outil de résilience non seulement pour l’exploitant, mais pour le bien commun.

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Bibliographie

DRAAFbretagne. (2020, 03 05). Récupéré sur AGRESTE: https://draaf.bretagne.agriculture.gouv.fr/IMG/xlsx/09_recolte_entreprises_v2_cle013197.xlsx

Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. (2015). plan national de développement pour l’agroforesterie 2015. Récupéré sur https://agriculture.gouv.fr/un-plan-national-de-developpement-pour-lagroforesterie

Ministère de l’Agriculture et de l’alimentation. (2016). Le programme national de la forêt et du bois (PNFB) 2016-2026.

Observatoire de l’environnement de Bretagne. (2020). Mobiliser le bois énergie de manière durable. Récupéré sur https://bretagne-environnement.fr/zoom-sur-Mobiliser-bois-energie-maniere-durable

Observatoire de l’Environnement en Bretagne. (2018). LE BOCAGE EN BRETAGNE. Récupéré sur https://bretagne-environnement.fr/bocage-bretagne

PBEB. (2018). Récupéré sur http://www.planboisenergiebretagne.fr/espace-documentaire/ressources-bois-energie/download/53/101/16

 

 

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