Rénovation énergétique : le risque de concentration guette le secteur

Éclairage signé Sabrina Tiphaneaux, directrice d’études Les Echos études

 

Un soutien public massif…

La rénovation énergétique des logements est une « priorité nationale » du gouvernement et les moyens mis sur la table sont colossaux. 2 milliards d’euros supplémentaires seront injectés en 2021 et 2022 pour soutenir la rénovation thermique des bâtiments dans le cadre du plan France Relance.

Cette nouvelle mesure, annoncée en septembre 2020, s’ajoute à l’arsenal déjà en place : plan de rénovation énergétique des bâtiments qui vise 500 000 rénovations par an, transformation du crédit d’impôt en prime (MaPrimeRénov) avec un budget rehaussé et un périmètre élargi…

En parallèle, la 5ème période des CEE commencera en 2022 et il est très probable que les objectifs augmentent encore. Ce dispositif est apprécié des pouvoirs publics car il ne leur coûte rien, tout le financement reposant sur les fournisseurs d’énergie et surtout leurs clients.

… insuffisant pour tenir les objectifs

Le gouvernement souhaite notamment « le renforcement du soutien à la rénovation globale » et l’éradication des passoires thermiques à l’horizon 2030. Ces engagements sont structurants pour la filière de la rénovation énergétique car ils supposent de s’attaquer à deux problématiques lourdes : le financement et la constitution d’offres globales.

Car une rénovation énergétique coûte cher et même avec les aides, le reste à charge est élevé. C’est même le principal frein à la rénovation. La situation concernant le reste à charge ne va pas changer à moyen terme, d’autant que le contexte économique très dur va aggraver le problème.

L’impact économique de la crise sanitaire, qui s’éternise malgré le lancement de la compagne de vaccination, va se faire sentir longtemps. Les ménages risquent de faire preuve d’attentisme en 2021, voire au-delà, en reportant, quand ils le peuvent, leur projet de travaux.

Les seules parades sont d’augmenter les aides. Les finances publiques le permettront-elles ? Pas sûr. En revanche, les objectifs en hausse des CEE se traduiront peut-être par une augmentation du niveau des primes. En l’état, l’objectif de 500 000 logements rénovés par an à moyen terme semble peu probable. Atteindre 400 000 rénovations annuelles d’ici 3 ans serait déjà une bonne performance.

L’autre difficulté à résoudre pour les acteurs du marché est de constituer une offre globale, simple et lisible, intégrant notamment audit énergétique, financement et réalisation des travaux.

La bataille du lead

Même si le marché de la rénovation énergétique ne tient pas toujours ses promesses, c’est un terrain de jeux pour une multitude de prétendants d’horizons divers.

Les fournisseurs d’énergie (EDF, Engie, Total…), soumis à une concurrence rude sur leur marché historique, cherchent à diversifier leur gamme d’offre. Le marché de la rénovation énergétique leur ouvre, en plus, la possibilité de produire des CEE. Les fabricants de matériaux et d’équipements (Atlantic, Rockwool, Saint-Gobain, Vaillant…), avec leurs partenaires installateurs, cherchent à se rapprocher des clients finaux pour mieux vendre leurs produits.

Les négociants et enseignes de bricolage (BigMat, Castorama, Rexel…) s’appuient sur leurs points de vente pour attirer des projets de rénovation et diversifier leur offre de services.

Les délégataires CEE (Effy, GEO, Vos Travaux Eco…) s’intègrent de plus en plus sur la chaîne de valeur de la rénovation énergétique pour devenir des opérateurs globaux. Les courtiers (Activ Travaux, Illico Travaux…) jouent la carte de l’offre globale via l’intermédiation. Enfin, les professionnels du BTP (artisans et PME) sont au cœur de l’écosystème de la rénovation énergétique. Ils sont courtisés par tous les autres acteurs de la filière et cherchent à s’organiser, notamment en réseaux, pour gagner en visibilité.

Tous ces acteurs ont un objectif commun : être le point de contact des consommateurs. C’est le nerf de la guerre car il est synonyme de captation d’une part importante de la valeur. Mais la concurrence est très vive et le paysage proche de la saturation. Dans cet écosystème très atomisé, et durement touché par la crise sanitaire, tout pousse à une accélération de la concentration du secteur…

Scénario d’évolution du jeu concurrentiel dans le secteur de la rénovation énergétique

 

Source : Les Echos Etudes

commentaires

COMMENTAIRES

  • Il y aura rénovation énergétique dans ma maison lorsqu’on m’en aura mis à la porte pour refus d’obtempérer. En effet je n’ai rien à faire de perdre l’épargne faite pour mes vieux jours (destinée à conserver un véhicule et des loisirs) en l’engloutissant dans des travaux contraints inamortissables pour me retrouver piéton et sans activités.
    Car qu’amortirai-je lorsque je chauffe ma maison pour trois à quatre cents euros par hiver ? (un peu de bois coupé chez moi, un convecteur de 800 W, une seule (grande) pièce isolée sans normes particulières, 15 degrés et des chandails).
    Une assistante sociale me classerait certainement « précaire énergétique », mais il se trouve que c’est volontaire et que je ne demande rien à personne de ce côté-là, me bornant à fustiger les idéologues des énergies idiotes et ruineuses.

    Répondre
    • Bonjour, une enveloppe de meilleure qualité vous ferait économiser bois et électricité, tout en augmentant de quelques degrés votre température intérieure. Si on vous classe en précarité énergétique, vous êtes éligibles aux plus grosses primes nationales (CEE, MaPrimeRénov’). Et si vous habitez dans une région dite généreuse, votre reste à charge peut être couvert par des aides régionales ou des collectivités territoriales. Un meilleur confort pour une petite facture, le prix à payer pour améliorer votre confort et moins dézinguer l’environnement est tout de même peu élevé…

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