Offensive stratégique des Émirats sur le gaz
La compagnie nationale des Émirats arabes unis, Adnoc, confirme ses ambitions mondiales en lançant une offensive stratégique de près de 18,7 milliards de dollars sur le groupe énergétique australien Santos. Cette opération illustre la volonté d’Abou Dhabi de renforcer sa position dans le gaz naturel liquéfié (GNL), dans un contexte mondial marqué par la quête de sécurité énergétique.
Une offre majeure sur le gaz australien
C’est une offensive stratégique de grande envergure que vient d’initier Adnoc, la compagnie pétrolière nationale des Émirats arabes unis. Par l’intermédiaire de sa filiale XRG, elle a déposé une offre dite « finale, non contraignante » d’un montant de 18,7 milliards de dollars américains pour le rachat du groupe Santos, un acteur clé du secteur gazier en Australie et en Asie.
Cette proposition valorise l’action de Santos à 5,76 dollars australiens, ce qui représente une prime de 28 % par rapport à son dernier cours de clôture à la Bourse australienne. Une incitation suffisamment forte pour que le conseil d’administration de Santos affiche son intention de recommander l’opération à ses actionnaires, sous réserve d’un accord final et de l’approbation des autorités réglementaires compétentes.
Santos, un géant gazier régional
Fondé en Australie, Santos s’est imposé au fil des années comme l’un des piliers du marché du gaz naturel liquéfié dans la région Asie-Pacifique. Son portefeuille d’actifs s’étend de l’Australie à la Papouasie-Nouvelle-Guinée, en passant par le Timor oriental et même les États-Unis. L’entreprise joue un rôle stratégique dans l’approvisionnement en énergie de plusieurs marchés en croissance rapide, notamment en Asie du Sud-Est.
Le groupe détient également d’importantes infrastructures d’extraction et de liquéfaction, ce qui en fait une cible de choix pour une entreprise comme Adnoc, désireuse de renforcer sa présence à l’international et de sécuriser de nouveaux débouchés pour ses activités gazières.
Une offensive stratégique d’Adnoc à visée internationale
Cette offre sur Santos n’est pas une surprise pour les observateurs du secteur. Depuis plusieurs années, Adnoc a entamé une diversification méthodique de ses investissements à l’étranger. Dans un contexte où les monarchies du Golfe cherchent à préparer l’après-pétrole, les Émirats arabes unis multiplient les acquisitions dans le domaine de l’énergie, avec un accent particulier sur le gaz et les énergies de transition.
L’offre sur Santos, précédée par deux tentatives confidentielles en mars, marque un tournant : elle traduit une volonté claire d’Adnoc de construire un acteur intégré et mondial dans le secteur du GNL. Dans un communiqué, la compagnie souligne que cette opération viserait à « renforcer la sécurité énergétique nationale et internationale », un objectif devenu central depuis la crise énergétique mondiale déclenchée par la guerre en Ukraine.
Un rachat aux multiples enjeux géopolitiques
Si l’offre est acceptée, elle pourrait renforcer le rôle des Émirats dans les circuits mondiaux du gaz, en leur offrant une plateforme industrielle dans la région Asie-Pacifique. L’Australie est actuellement le premier exportateur mondial de GNL, et Santos en est l’un des principaux producteurs. Adnoc y gagnerait donc un accès stratégique à des marchés-clés, notamment la Chine, le Japon et la Corée du Sud.
Cependant, cette opération pourrait soulever des réticences du côté des régulateurs. Les autorités australiennes scrutent désormais de près les investissements étrangers dans les secteurs jugés sensibles. Le rachat d’un acteur aussi important que Santos par une entreprise publique étrangère, même d’un pays allié, pourrait alimenter des débats politiques, notamment sur la souveraineté énergétique.
Les autorités américaines et papouasiennes auront également leur mot à dire, car Santos est impliqué dans plusieurs projets à l’international, notamment aux États-Unis. Les délais de validation réglementaire pourraient donc s’étendre sur plusieurs mois.
Une réaction positive des marchés face à l’offensive stratégique émirienne
L’annonce de l’offre d’Adnoc a provoqué un bond immédiat du titre Santos, qui gagnait près de 12 % à la Bourse de Sydney quelques heures après l’ouverture. Les analystes saluent une proposition cohérente sur le plan industriel, et susceptible de créer des synergies importantes dans la chaîne de valeur du GNL. Le marché semble par ailleurs anticiper une issue favorable aux discussions, même si les termes définitifs restent à négocier.
Adnoc à la conquête de l’Asie-Pacifique
Avec cette offre à 18,7 milliards de dollars, Adnoc poursuit sa mue en acteur mondial de l’énergie, bien au-delà de son fief du Golfe. Le gaz naturel liquéfié, perçu comme un levier de transition énergétique, devient l’un des piliers de sa stratégie internationale. En visant Santos, la compagnie d’Abou Dhabi s’ancre dans une zone hautement stratégique, à la fois riche en ressources et proche des grands centres de consommation énergétique. Reste désormais à convaincre les régulateurs et finaliser une transaction qui pourrait remodeler l’équilibre du secteur gazier mondial.
