Luc Rémont, candidat à la tête d’EDF, dévoile son plan face à une « crise sérieuse »

Le candidat proposé par l’Elysée pour sauver EDF, Luc Rémont, a dévoilé mercredi devant le parlement sa feuille de route pour surmonter la « crise sérieuse » que traverse le géant électricien fragilisé par une production nucléaire au plus bas et une dette gigantesque.

Passage obligé du processus de nomination, l’actuel responsable des opérations internationales de Schneider Electric s’est plié pendant quatre heures au jeu des questions-réponses lors d’une audition parfois électrique devant les députés de la Commission économique de l’Assemblée nationale, précédée d’un entretien plus cordial avec les sénateurs.

Pour planter le décor tendu, la rapporteure LR à l’Assemblée nationale Anne-Laure Blin a d’emblée émis un avis défavorable à sa nomination.

M. Rémont, 53 ans, doit succéder à Jean-Bernard Lévy qui était aux manettes d’EDF depuis 2014. Le départ anticipé de celui-ci a été annoncé cet été en même temps que la renationalisation d’EDF.

Si sa nomination est validée en conseil des ministres, M. Rémont aura devant lui des chantiers de titan.

Le contexte est « critique à court terme », a reconnu devant les sénateurs le candidat désigné par l’Elysée.

« Dans ce contexte de crise énergétique, EDF traverse elle-même une crise sérieuse, d’ordre technique et industrielle, qui accentue la tension sur l’offre d’énergie », a-t-il constaté.

L’urgence est connue: la moitié du parc nucléaire français est indisponible en raison de maintenances programmées ou de problèmes de corrosion. Tout l’enjeu sera de faire redémarrer suffisamment de réacteurs pour faire face aux pics de consommation dans le coeur de l’hiver.

« Dès les premières heures de (s)on mandat », M. Rémont prévoit de se consacrer « totalement » à « tenir les engagements de l’entreprise pour la reprise de la production des réacteurs à l’arrêt », a-t-il assuré devant les sénateurs.

« Mon objectif est de tenir la demande exprimée par RTE (le gestionnaire du réseau de transport d’électricité) d’une production nucléaire comprise entre 38 et 40 GW au 1er décembre » et « entre 45 et 50 GW au 1er janvier », a-t-il détaillé dans des réponses écrites adressées aux parlementaires dont l’AFP a eu connaissance.

D’emblée il a appelé les Français à consommer moins d’électricité pour éviter le risque de délestage « cet hiver et les suivants ».

– Dette colossale –

Au-delà de l’hiver, le candidat a présenté ses priorités à moyen et long terme citant la relance d’un programme nucléaire voulu par le gouvernement (6 nouveaux réacteurs, et des petits réacteurs de type SMR), l’investissement hydroélectrique, « un rôle de premier plan dans les renouvelables » et « le développement et l’adaptation des réseaux à une électricité plus décentralisée », notamment à travers l’autoconsommation, selon ses réponses écrites.

La situation financière d’EDF, dont la dette pourrait atteindre 60 milliards d’euros à la fin de l’année, demande, elle, de la « vigilance à court terme pour ne pas devoir réduire les investissements et compromettre l’avenir », a-t-il jugé.

Si cette situation « devrait s’améliorer » avec le redémarrage de réacteurs, M. Rémont a jugé nécessaire une « visibilité à long terme » sur les mesures réglementaires destinées à limiter la hausse du prix de l’électricité pour les clients dont EDF supporte la majorité des coûts.

En cause selon lui, l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh), qui « induit une sous-rémunération » de l’activité nucléaire d’EDF et « n’a pas permis le développement d’une concurrence dans la production ».

Il a demandé aussi une réforme « profonde » des règles du marché européen pour corriger des « défaillances mises en lumière par la crise actuelle », en jugeant « indispensable » le découplage des prix du gaz et de l’électricité.

A l’heure des questions, le candidat a été passé au grill sur son rôle joué dans la vente controversée en 2014 de la branche énergie Alstom à General Electric lorsqu’il conseillait Alstom comme banquier à Bank of America Merrill Lynch, une « forfaiture contre l’intérêt national », a lancé le député du groupe Nupes-LFI Matthias Tavel qui votera contre, tout comme le RN. C’était « la seule solution possible pour assurer l’avenir de ces activités », selon M. Rémont.

Autre sujet de friction, les oppositions craignent un démantèlement avec une séparation entre l’activité historique nucléaire et les renouvelables. Il y aura « une production diversifiée, et non dans le tout nucléaire », a-t-il répondu.

Pour être validée, la candidature de M. Rémont doit recueillir les votes de 3/5e des membres des deux commissions. Résultat attendu mercredi après-midi.

commentaires

COMMENTAIRES

  • EDF avec le supplément d’ARENH Surprise (et les défaillances de volume nucléaire dues à la CSC mais non ré-appliquées sur les volumes ARENH) a LARGEMENT PAYE à très bon compte de l’électricité Allemande au CharBON !!! C’est un scandale que peu de gens veulent voir ou entendre !!!

    Le producteur continental le plus décarboné a littéralement financé (au prix Fort et aberrant et à une échelle MACRO(n)scopique) de l’électricité Hyper Riche en CO2 sous contrainte de l’état pour « donner » à manger à des distributeurs aux dents longues mais incapables de produire réellement !!! Quelle Transition, C’est bô, cela fait rêver pour l’avenir de nos gosses et laisse entrevoir de belles années pour les « sans-dents » de ce pays !!!
    La diversification de la distribution électrique, c’est aussi une diversification du « pouvoir d’achat » : Beaucoup plus pour un petit nombre, nettement moins pour beaucoup de monde, un vrai « Jeu » à somme nulle et à résultat moyen très Nul !!!

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  • Les réponses de Luc Rémont qui me plaisent si elles sont tenues :
    « Mon objectif est de tenir la demande exprimée par RTE (le gestionnaire du réseau de transport d’électricité) d’une production nucléaire comprise entre 38 et 40 GW au 1er décembre » et « entre 45 et 50 GW au 1er janvier », a-t-il détaillé »
    « La situation financière d’EDF, dont la dette …En cause selon lui, l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh), qui « induit une sous-rémunération » de l’activité nucléaire d’EDF et « n’a pas permis le développement d’une concurrence dans la production ».
    Ce qui ne me plait pas c’est sa réponse ambigüe (venant du « en même temps » !) :
    « démantèlement avec une séparation entre l’activité historique nucléaire et les renouvelables. Il y aura « une production diversifiée, et non dans le tout nucléaire », a-t-il répondu

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    • @Michel
      « Il y aura « une production diversifiée, et non dans le tout nucléaire » »
      Il est toujours stupide de vouloir ne pas mettre sous la même gestion des morceaux d’alimentation du réseau, car des optimisations locales ne sont pas cohérente à une optimisation globale.
      Ceci dit, le nucléaire + hydraulique ne peut absolument pas être utilisé comme back-up des intermittents.
      Et on se retrouve avec toujours le même problème, construire trop d’intermittent conduit inexorablement à construire en parallèle des centrales pilotables, à flamme.
      Vous préférez le gaz ou le charbon ?
      On devrait demander aux Allemands, ils sont devenus des spécialistes.

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  • Bonjour,
    En fin du document ci-dessus Luc Rémont répond:
    « Il y aura « une production diversifiée, et non dans le tout nucléaire », a-t-il répondu. »
    Mais quelle diversification ?
    – Hier soir, au pic de la consommation, à 19h30, l’éolien produisait 2 411 MW pour 19 099 MW installés. Soit 12,6% de la puissance installée. On ne parle jamais de cela. L’éolien produit trop souvent très peu… 10 fois plus d’éoliennes produiront souvent 10 fois très peu !!!
    – Par contre on entend dire que ce n’est pas normal que la production d’électricité par les centrales nucléaires ne soit que de 50% de la puissance installée.
    En conclusion :
    – Quand le parc nucléaire sera entretenu comme il se doit, je suis prêt à parier une grosse somme sur le fait de le nucléaire produira dans quelques mois au moins 70% de la puissance installée ?
    – Par contre je ne suis pas du tout prêt à parier que l’éolien produira pendant quelques jours, plus de 30% de la puissance installée ?
    En conséquence:
    – Tous les États gardent une puissance pilotable capable de couvrir tous les besoins
    – L’éolien est un investissement qui ne produit pas toujours quand on en a besoin
    – L’éolien est un investissement en double.
    – Le raisonnement et le même pour le solaire.
    Remarques:
    – Le stockage de l’énergie (électrique) est très loin d’être à la hauteur des besoins
    – Nous consommons 3 à 4 fois plus d’énergie fossile (chauffage, transports, industrie…) que d’énergie électrique.
    – Il faudra attendre plusieurs décennies avant une éventuelle solution avec la fusion nucléaire.
    – ASTRID est un projet de prototype de réacteur nucléaire français de quatrième génération. Il a déjà fonctionné et pourra compléter la diversification en utilisant les « déchets » des centrales actuelles.
    – Avez-vous d’autres remarques ?

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    • @Stoclin,

      Oui, une autre remarque :
      – on commence à manquer d’eau en bien des places en France en été (mais pas que). Une remise à plat de nos possibilités hydrauliques en incluant de nouvelles STEP serait Urgent pour essayer de pallier à cette situation qui risque d’empirer en moyenne d’année en année…

      Nota : En format « Full Nucléaire » et/ou « Nucléaire + ENRi en proportion raisonnable », les STEP condamnent l’utilisation du Gaz à 0 !!!
      En format 100% ENRi, les STEP sont clairement insuffisantes pour compenser l’intermittence et il faudra des Centrales à Gaz – 26 GW d’après RTE ce qui est énorme en capacité !!! (masquée par les promesses du BioGaz en ce moment, promesses non tenables à large échelle, sauf avec des Plans de type « khmers marrons » ou on méthanise quasi tout ce qui pousse (voir bouge !?) !!!)

      Répondre
    • Et la capture et le stockage du carbone
      Il ne sera pas possible de limiter la présence de CO2 dans l’atmosphère sans capture et stockage des émissions de carbone provenant notamment de l’industrie. Le GIEC, y compris dans son dernier rapport, l’Agence internationale de l’énergie, le World Economic Forum, l’Académie des sciences américaine ou l’Imperial College de Londres prônent le développement et le recours massif à cette technologie.
      Les capacités de stockage souterrain en Europe sont grossièrement estimées à 300 milliards de tonnes, soit l’équivalent de 100 ans d’émissions mondiales en 2019, mais (pour être raisonnable) il faut encore confirmer ces capacités et l’intégrité des sites pour que les projets opérationnels de stockage du CO2,
      Cette technologie permettrait de continuer de consommer du fossile et d’attendre le nucléaire EPR en grande quantité et développer la 4 G. Avec cette dernière en production ns aurions une élec bon marché à profusion et cela permettrait de consommer les déchets actuels en ayant une vrai autonomie énergétique pour plusieurs siècles ! Le  » bonheur » à portée de main pour notre descendance…
      Pour la fusion il faudra attendre le prochain siècles.

      Répondre
      • @Michel
        J’ai quelques doutes sur la capture du carbone.
        Un peu, oui, beaucoup, j’ai des doutes.
        Le premier problème étant la capture, qui ne semble raisonnablement possible que si ce CO2 est déjà concentré, dans la cheminée de l’usine.
        L’autre étant le besoin d’être certain que les espaces clos envisagés restent étanche dans le temps, même en cas, par exemple, de tremblement de terre.

        Il ne faudrait pas qu’on se berce d’illusion sur les possibilité, ce qui nous permettrait d’échapper aux efforts indispensables le cœur en paix !.

        Répondre
        • @ Hervé
          Pour te rassurer je te conseille de lire :
          La capture et le stockage du carbone, comment ça marche?
          de La rédaction transitions et énergies du 26 octobre 2022
          Bien sûr il y a tjrs un risque en cas de tremblement de terre ou de « big » météorite qui frapperait la terre !
          Le risque zéro n’existe pas ! Tandis que le risque de pénurie d’élec avec le  » renouvelable + gaz » est important et ceci sans faire baisser le taux de CO² induit !

          Répondre
  • « le développement et l’adaptation des réseaux à une électricité plus décentralisée », notamment à travers l’autoconsommation, selon ses réponses écrites.
    Manifestement, il n’y comprend encore rien.
    L’autoconsommation n’existe pas, sauf à installer chez chacun de nous un système avec batterie, …
    Sinon, un système décentralisé comme des panneaux PV sur nos toits fonctionne de la façon suivante :
    – Lorsque le soleil brille, la consommation locale du ménage est faible, les personnes sont au travail, et les panneaux envoient la puissance sur le réseau. Par le réseau basse tension qui n’a jamais été prévu pour ça.
    – C’est lorsque le soleil ne brille pas que les personnes consomment de l’électricité, par exemple dans le pic de fin d’après midi. Et on voit bien que le système pilotable centralisé doit être capable de répondre à la totalité de la consommation.

    La dite « autoconsommation », qui n’existe que comme un phénomène très limité, est donc la cause du besoin de transformer considérablement le réseau, pas la solution.

    Remarquons que le problème est moins dramatique pour les grands parcs éoliens intermittents, qu’on peut au moins brancher sur le réseau central THT.
    Un moindre mal.

    Répondre
    • @Hervé Guéret,

      Pour tenter de nuancer (et m’auto-rassurer), sur votre propos : «  » Manifestement, il n’y comprend encore rien. «  » –> Il fait peut-être du politiquement « correct » de circonstances pour avoir les voies nécessaires (!?). Enfin je l’espère… Si Non, on est encore mal barré avec EDF et un PDG qui mettra 5 ans à comprendre sa boite et les impératifs physiques…

      Répondre
  • @APO
    Non, c’était juste une constatation, pas réellement une critique, et son incompétence est normale, il ne vient pas de ce milieu.
    J’ai regardé une partie de son audition, et il m’a fait une très bonne impression, bien dans ses bottes, intelligent et de bon sens.
    Bon espoir, s’il a l’intelligence de bien choisir ceux qui vont l’assister..

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