Licencié pour avoir refusé de prendre l’avion, Gianluca Grimalda n’a jamais renoncé à ses principes. Deux ans après une affaire qui a fait le tour du monde, le chercheur italien rejoint l’université Masaryk, en République tchèque, qui affirme pouvoir conjuguer exigences scientifiques et engagement climatique. Un parcours hors-norme, à la croisée de l’activisme et de la recherche.

Un refus de principe devenu affaire d’État

En 2023, Gianluca Grimalda, spécialiste en psychologie sociale, travaille pour l’Institut pour l’économie mondiale (IfW) à Kiel, en Allemagne. De retour d’une mission scientifique en Papouasie-Nouvelle-Guinée, il refuse de rentrer par avion, fidèle à son engagement contre les émissions de CO₂ liées au transport aérien.

Ce choix, en apparence personnel, déclenche une crise avec son employeur, qui finit par le licencier pour « manquement à ses obligations contractuelles ». L’affaire devient médiatique : elle illustre la tension entre la pratique scientifique internationale et la nécessité de réduire l’empreinte carbone individuelle, même dans le monde de la recherche.

La prise de risque de Gianluca Grimalda… et un accord final

Le périple de Grimalda pour rentrer d’Océanie sans avion prend des allures d’épopée. Il traverse des zones instables, échappe de peu à une prise d’otage, assiste à une éruption volcanique. Malgré tout, il maintient le cap. Pour lui, cette cohérence entre ses valeurs et ses actes est non négociable.

L’histoire se clôt juridiquement début 2025, par un accord amiable avec son ancien employeur. Grimalda obtient une indemnisation, dont une grande partie — 75 000 euros — est reversée à des associations environnementales. Ce geste confirme que, pour lui, la lutte climatique dépasse le cadre personnel.

Une nouvelle institution, plus en phase avec ses convictions

Grimalda annonce désormais qu’il prendra ses fonctions début 2026 à l’université Masaryk, en République tchèque. Une institution qui, selon ses mots, accepte de « concilier ses convictions climatiques avec les réalités académiques ».

Il continuera à mener ses recherches sur les effets sociaux du changement climatique, et prévoit de retourner à Bougainville, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, pour clore le terrain entamé deux ans plus tôt — toujours sans recourir à l’avion.

L’engagement militant assumé de Gianluca Grimalda

Au-delà de ses travaux scientifiques, Grimalda est actif au sein de Scientist Rebellion, une branche du mouvement Extinction Rebellion regroupant des chercheurs mobilisés pour l’urgence écologique. Son cas est devenu emblématique : celui d’un scientifique prêt à mettre sa carrière en jeu pour rester fidèle à ses convictions.

Il raconte son histoire dans un livre — A fuoco – Il mondo brucia (En feu – Le monde brûle) — et dans un documentaire primé au Festival du film climatique de Frome (The Researcher). Ces deux œuvres retracent son parcours intellectuel, ses choix radicaux, et son rapport exigeant à la vérité scientifique face à la crise climatique.

Un appel à la désobéissance climatique

Pour Gianluca Grimalda, sa trajectoire n’est pas un cas isolé, mais un appel collectif : « J’espère que mon histoire encouragera d’autres à désobéir face à l’urgence climatique », confie-t-il. Dans un monde académique souvent contraint par la logistique et les impératifs de mobilité, il propose une autre voie, faite de lenteur, de cohérence et de courage.

En refusant le confort des habitudes pour rester fidèle à ses principes, Grimalda incarne une forme rare d’intégrité scientifique. Il pose une question brûlante à ses pairs : que vaut la recherche, si elle ne s’applique pas à elle-même les conclusions qu’elle produit ?