agrivoltaisme evolutions bienvenues quant reglementation caracterisation projets - Le Monde de l'Energie

Agrivoltaïsme : des évolutions bienvenues quant à la réglementation et la caractérisation des projets

Une tribune signée Frédéric Lebeau, fondateur du Digital Energy and Agriculture Lab (DEAL) de l’Université de Liège, et Pascal Brunet, Chef de projet Énergie et Numérique chez Naldeo Technologies & Industries.

L’agrivoltaïsme : une pratique désormais définie et encadrée

L’examen du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (EnR) en première lecture à l’Assemblée nationale s’est déroulé du 8 novembre au 19 décembre 2022. Un vote solennel est prévu le 10 janvier 2023. Les mesures phares de ce texte portent sur la simplification administrative des projets au titre de l’intérêt public majeur, l’obligation de mise en œuvre de solaire photovoltaïque sur les parkings de plus de 1500m², et le rôle des acteurs locaux dans la planification des projets d’ENR.

Relativement à l’agrivoltaïsme, le titre II du projet de loi en précise la définition et encadre son développement, dans l’article L. 314-36 : « une installation agrivoltaïque est une installation de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil et dont les modules sont situés sur une parcelle agricole où ils contribuent durablement à l’installation, au maintien ou au développement d’une production agricole ».

Cette définition est complétée par un ensemble de critères caractérisant le statut agrivoltaïque de
l’installation, qui doit notamment :

  • Être réversible ;
  • Être précédée d’une installation photovoltaïque en toiture des bâtiments d’exploitation existants, lorsque cela est possible techniquement ;
  • Permettre à la production agricole d’être l’activité principale de la parcelle agricole ;
  • Garantir une production agricole significative et un revenu durable en étant issu ;
  • Fournir directement à l’échelle de la parcelle agricole au moins un des services parmi :
    • L’amélioration du potentiel et de l’impact agronomique ;
    • L’adaptation au changement climatique :
    • La protection contre les aléas ;
    • L’amélioration du bien-être animal.

Les trois premiers critères relèvent globalement de la conception technique du projet et du choix des
équipements, pour viser une compatibilité avec les bâtiments, les équipements et l’itinéraire technique agricole en place ou planifié. Cette expertise est présente classiquement chez les développeurs de projets ou les bureaux d’études spécialisés en énergie photovoltaïque.

Les deux derniers critères appellent une compréhension fine des conditions d’exploitation, sur les plans agro-pédo-climatiques et zootechniques. Afin de fournir les services précités, la conception et le pilotage de projets doivent idéalement être fondés sur une analyse quantitative des effets induits par les modules photovoltaïques sur la parcelle.

Caractériser l’agrivoltaïsme par sa modélisation et son suivi agronomique in-situ.

ULiège et Naldeo collaborent depuis deux ans sur les sujets de la modélisation, du pilotage, et du suivi de projets agrivoltaïques.

Le groupement développe des méthodes et des outils, notamment un framework de modélisation multi-modèles, pour enrichir l’état des connaissances et dimensionner les projets avec justesse (https://hdl.handle.net/2268/298009). Ces travaux ont d’ores et déjà permis d’aider à la conception de plusieurs projets en France, sur des parcelles en polyculture élevage, fruitiers et cultures fourragères. Le groupement agrège des compétences complémentaires en agronomie analytique et modélisation énergétique et économique.

Ce rapprochement permet de prescrire des pratiques innovantes, et dimensionnées conformément aux besoins de la parcelle. Citons par exemple la justification par modélisation des bénéfices du pâturage tournant dynamique sous ombrage photovoltaïque, ou encore la quantification des rendements de luzerne et de blé. Au niveau scientifique, un article a été présenté durant le congrès international Agrivoltaics2022 sur le rapprochement de l’agrivoltaïsme avec les haies brise-vent (https://hdl.handle.net/2268/293903).

Nourri par l’expertise scientifique apportée par ULiège, Naldeo met à profit son expertise d’une décennie en pilotage optimal de systèmes énergétiques complexes, et développe une version de contrôleur ajustée aux enjeux de l’agrivoltaïsme. Au-delà de la simple cohabitation des activités, la stratégie l’optimisation vise à permettre la fourniture des services agrivoltaïques tout en satisfaisant les productions énergétiques attendues.

Les paramètres de pilotage sont en lien avec les caractéristiques intrinsèques des zones de culture, les conditions climatiques, les paramètres génotypiques et phénotypiques et les conditions d’exploitation. Le système proposé par Naldeo peut combiner plusieurs modes de pilotage et il place l’agriculteur au centre du processus de décision. Par analogie avec l’agriculture de précision, le module décisionnel informe l’agriculteur qui peut piloter les décisions. Le système informe des conséquences probables des choix tout en permettant naturellement un pilotage automatique.

Une collaboration s’inscrivant dans la durée pour une amélioration continue

L’agrivoltaïsme demeure un sujet récent. Si le rapprochement avec le sujet de l’agroforesterie a permis à la communauté scientifique de se doter de méthodes d’analyse, le recul expérimental demeure relativement modéré du fait d’un nombre limité de projets ou de leur nature confidentielle. Le Pôle National de Recherche de l’INRAE comblera ce manque de connaissance par acquisition des données de projets. Les mécanismes dictant les productions agronomiques sur le temps long sont largement multifactoriels et imparfaitement pris en compte dans les bilans et les modèles dans le cadre de l’agrivoltaïsme.

Il paraît donc prudent et nécessaire de prévoir un processus d’amélioration continue, permettant d’enrichir les étapes de décision dans la durée, en s’appuyant sur les résultats généraux mesurés ponctuellement, par exemple les rendements de chaque récolte, ou sur des mesures continues telles que celles du phénotypage numérique (qui s’attache à extraire automatiquement les traits caractéristiques des plantes pour décrire le stade de développement des plantes et leur état de santé).

La dynamique des travaux de recherche appelle une veille régulière afin de tenir compte de l’état des avancées scientifiques pour identifier de nouvelles symbioses ou des facteurs limitants.

Les évolutions identifiées à ce stade portent sur l’enrichissement des modèles agronomiques de connaissances plus fondamentales (i.e. Modèles Fonctionnels-Structurels de Plantes, FSPM, utilisés à ULiège pour le développement de jumeaux numériques en agriculture https://hdl.handle.net/2268/290931), l’implémentation d’algorithmes de reconnaissance optique pour le phénotypage depuis les flux vidéo, et l’ajustement de paramètres de modèles par des techniques d’apprentissage et de vision par ordinateur.

ULiège partage une banque de données de mesures in-situ issue de travaux de recherches sur le site de Gembloux pour l’entraînement supervisé de modèles d’apprentissage, ouvrant sur une perspective d’utilisation de drones et de caméras dans les suivis agronomiques de projets agrivoltaïques. Enfin, Naldeo mobilise ses expertises historiques en échanges thermiques et écoulements pour développer des modèles du microclimat propre à ces projets.

Le groupement partage des environnements de développement commun et intensifiera sa collaboration au travers de projets de recherche (post-doctorat) et de projets concrets à fort impact.

commentaires

COMMENTAIRES

  • On croit volontiers découvrir que l’ombre est un facteur favorable au développement des plantes qui ont besoin plus de la lumiere que des rayons du Soleil, bien que des techniques qui le permettaient soient utilisées depuis des siècles, comme les hautes futaies des haies.qui filtraient et diffusaient les rayons du Soleil en projetant leurs ombres sur de grandes surfaces.

    Répondre
    • Assez Vrai dans le Sud de la France, nettement moins dans le Nord…

      Quelle sera la résistance de certaines de ces installations en cas de fortes tempêtes !?

      Répondre
      • APO qui pose des questions alors qu’il suffit juste de vérifier ce qui se fait déja sur le terrain .. en plus le réseau existe déjà alors pas de cout supplémentaire et justement le fait de produire enfin proprement sans dangers et sans déchets au plus prêt des lieux de consommation avec les ENR permet de réduire tres fortement les pertes réseau …

        Répondre
        • Salut Régis, cool de te lire ainsi que ton « terrain » favori !

          Tes Bô commentaires me manquaient ! Au fait, tu dimensionnes comment un réseau électrique !? Si tu doubles la puissance qui y transite (et en plus par temps chaud) tu laisses les anciens cables ou tu renforces !?
          Pour les tempêtes et l’Agrivoltaisme, ce sont les assureurs et les banquiers qui impacteront au 1er ordre certains types de projet après les premiers évènements si il y en a… (L’ouragan de 1987 sur la pointe bretonne avait calmé certains types de batiments agricoles et leur développement durant pas mal d’années, ce fut une bonne chose à l’époque mais avec le temps on oublie… Les Belles tempêtes, c’est pas tous les jours sinon l’éolien produirait mieux mais on ne pourrait pas l’installer, ni tous les ans…)

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  • Il va quand même falloir penser aux couts que cela peut représenter sur les réseaux électriques !!! Pour une utilisation 15% du temps le cout des réseaux est 5 fois supérieur à celui d’une source de production produisant 75% du temps (sans parler de la dissipation de production – avec Avantages mais aussi inconvénients – et de production lors de période dont on n’a pas forcément beaucoup de besoins localement…)…

    Cela peut devenir un gouffre si cela est mal géré ou guidé par des objectifs de copinage (l’urbanisme en zone rural a eu ce genre de travers pendant des décennies…).

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  • Bonjour
    Chacun sait que les cultures poussent très bien à l’orée de bois…
    Pourquoi ne serait-ce pas presque pareil à l’ombre des panneaux ? !

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    • @Stoclin,

      C’est vrai que dans le Nord de la France, à l’orée des bois et en bordure de haie, les rendements des cultures sont plus faibles en règle générale, dans le Sud en été c’est en règle générale l’inverse notamment dans les prairies et aussi pour certains types de culture maraichères…

      L’Agrivoltaisme n’est pas dénué de sens dans certaines zones géographiques françaises et pour le moment utopiques dans d’autres… Ecrire des généralités sur ce sujet est donc forcément une « erreur » car ce sujet est plein de cas particuliers propres à chaque région et chaque type de culture (Vrai en 1 lieu, FAux dans 1 autre…, ni Vrai ni Faux dans d’autres… mais suivant les années…).

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